Il y a trois ans, débarquait de nulle part un parfait inconnu avec un album Folk qui allait… non…allez… je vous vois venir avec mes gros sabots. Vous vous dites : Il va encore nous dire que le gars, avec son album écouté par deux pellos sous acides, va révolutionner le genre Folk, le tout en y apportant moult preuves du bien-fondé de sa pensée. Qu’après avoir vécu des années dans les rues, il….mais non, même pas. Le gars ne va rien révolutionner du tout, au contraire. Il sortira même un album très classique de Folk Contemporain, mais suffisamment intemporel et racé pour qu’on le remarque et qu’on ait même envie d’attendre la suite. Ce premier album, éponyme de Barna Howard, quelque part entre Dylan et Garfunkel, d’une belle délicatesse, recevra en son temps les éloges de quelques webzines avisés mais passera quasi-inaperçu auprès de tous.
Le voici donc de retour avec un nouvel album, toujours Folk, mais entre Americana et Alt-Country cette fois-ci. Là encore, Howard ne révolutionne rien. Cette Country a été entendue mille fois ailleurs, peut-être plus profonde, ou grave ( le I See A Darkness de Bonnie Prince Billie ou les derniers enregistrements de Johnny Cash) mais son Folk touche la corde sensible, de par des mélodies parfaitement accessibles et une atmosphère oscillant entre nonchalance (rappelant parfois celle d’un JJ Cale) et mélancolie. Il faut dire que le sieur a la classe : il évite les clichés les plus éculés du genre (chœurs féminins ridicules, violons langoureux, pédale steel envahissante et j’en passe…) et ne garde que la substantifique moelle de la country. Donc des histoires tristes, une pédale steel, une guitare acoustique, point. Au climax des arrangements, on retrouvera en sus un banjo, une batterie privée de tout artifice, des chœurs d’une discrétion exemplaire et même l’électricité. Auxquelles se greffe la voix chaude, accueillante de Barna Howard.
Car, comme je le rappelais plus haut, l’album baigne dans une douce mélancolie, une quiétude à l’image de sa pochette, simple, rustique et chaleureuse, évoquant plus un Townes Van Zandt light (sans avoir la profondeur vocale, ni le passif de l’Américain), un Dylan ou, plus près de nous, une Gillian Welch ou encore Over The Rhine, que l’univers par moment torturé d’un Bonnie Prince Billie ou d’un Songs : Ohia. Il en résulte un album lumineux, simple, beau, très abordable mais auquel on pourrait reprocher une trop grande linéarité, avec l’impression que Barna Howard, pour le moment, reste engoncé dans ses influences. Le gars est tout de même capable de sortir de véritables bijoux (Hands Like Gloves, Quite A Feelin’, Lend Me A Moment), de faire un très beau disque mais pas encore un grand disque. Faudrait juste pour cela, qu’il passe à la vitesse supérieure (soit en consommant autre chose que du naturel, ou alors en essayant la dépression, excellent moteur de l’inspiration). Ce n’est donc malheureusement pas encore aujourd’hui que Barna Howard sortira de l’anonymat dans lequel il est confiné mais ce n’est pas non plus une raison pour l’ignorer et faire la fine bouche sur un artiste plus que prometteur.
Album sorti le 18 mai chez Mama Bird Recording Co, disponible sur le bandcamp de Barna Howard.