[mks_dropcap style= »letter » size= »52″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]R[/mks_dropcap]ecueil de nouvelles paru en 2010 (Burning bright, titre original), Incandescences s’ancre dans un quotidien américain plutôt sombre.
Ces histoires courtes rassemblent des personnages perdus, drogués, désespérés, tentant dans un dernier sursaut de s’offrir un sursis ou un nouvel espoir.
Ron Rash nous donne à voir des hommes, des femmes, des adolescents à la vie banale. Des gens de tous les jours qui ont vu leur vie basculer du mauvais côté et qui s’accrochent.
La lecture est âpre. Le style presque neutre et sans jugement de Rash s’adapte très bien à ces histoires noires.
Les chutes sont brutales comme la vie des (difficile de dire le mot héros) humains qui composent le recueil.
De la guerre de Sécession (avec une magnifique et terrible dernière nouvelle intitulée « Lincolnites ») à l’époque actuelle où sévit la drogue (un jeune adulte squattant l’appartement de ses parents et les obligeant à vivre dans une caravane non chauffée en plein hiver), Ron Rash nous emporte dans ce monde des anti héros, humains malgré tout et qui laissent, parfois, entrapercevoir un reste de bonté.
L’influence de Russell Banks nous semble omniprésente dans l’écriture de Rash et dans ses thèmes. Nous pensons aussi parfois à Raymond Carver, dans la banalité des situations exposées et aussi aux romans de Iain Levinson, où l’Amérique est vue à travers le prisme d’une recherche de travail pour survivre. Chez Rash, les études peuvent ressembler à une planche de salut. Mais à quel prix ? Telle cette nouvelle où un homme, simple, ne lisant jamais, voit son épouse le délaisser pour des études dont il considère qu’elles ne mèneront à rien. Le délitement de ce couple, vu à travers les yeux de l’homme seulement est une des moments terribles du livre. Les monologues intérieurs de ce personnages font écho puissamment au Wade de Russell Banks dans le magnifique Affliction.
Un recueil vénéneux et prenant, impossible à lâcher. Des nouvelles qui se dévorent et dont nous ne sortons pas indemnes.
Incandescences de Ron Rash, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Isabelle Reinharez, éditions du Seuil, avril 2015