Combien d’entre-nous sommes capables de citer plus de trois noms d’architectes ?
Alors même que c’est au cœur de leurs fantasmes que nous évoluons. Maisons, musées, des quartiers entiers, des cités immenses, partout où il y a bâtiment, il y a une volonté de concevoir un monde réglementé par l’espace. Perspective, référence, brutalité, autant de défis pour l’architecte.
Rudy Ricciotti pratique une architecture radicale, poétique presque violente dans sa réalisation. Son amour revendiqué pour le béton, ses déclarations controversées et son Stadium de Vitrolles ne l’ont pas vraiment mis sur les chemins des gloires évidentes. Son officialisation comme super-architecte il la doit au MuCem, une construction puissante, absolue, en plein délire pornographique avec ce pont pénétrant la cage mystérieuse, l’histoire, les civilisations et l’art. Une déclaration d’amour en béton armé.
Aujourd’hui, le MuCem lui donne raison, mais en 1994, le stadium de Vitrolles, sa première grande œuvre, a été l’objet de vives critiques. Un Ricciotti bashing dirait-on aujourd’hui. Un cube de béton longtemps laissé à l’abandon. Un projet que Rudy Ricciotti a largement défendu à l’époque. Et en y regardant de plus près, on trouve déjà dans cet esthétique, des idées qui se retrouvent au MuCem aujourd’hui.
Décrié par certains dans la profession, ils accusent Rudy de tapiner pour LAFARGE et lui reprochent de réserver des gorges profondes au pouvoir du BTP bien plus puissant et dangereux que le pouvoir politique. A travers le MuCem, ces mêmes détracteurs ont vu le grillage d’une burqa cachant, non pas le corps d’une femme, mais un bâtiment qu’il n’aurait pas su dessiner.
L’anarchitecture de Rudy Ricciotti ne laisse pas indifférente… C’est peut-être parce qu’aucun architecte français n’a gagné autant de projets prestigieux en si peu de temps depuis au moins cent ans. Auteur en France, du Stadium de Vitrolles, du Centre Chorégraphique National d’Aix-en-Provence d’Angelin Preljocaj, du Musée Cocteau à Menton, du Département des arts de l’Islam pour le Louvre à Paris, du stade Jean Bouin à Paris et aujourd’hui du Musée des Civilisations d’Europe et de Méditerranée à Marseille.
Il a construit également à l’étranger: la passerelle pour la Paix sur le fleuve Han à Séoul, le Philharmonie de Postdam à Berlin, le Palais des Festivals de Venise, le Musée d’Art Contemporain de Liège ou encore le Philharmonie de Gstaad pour le festival créé par Yehudi Menuhin.
Je vous conseille la lecture de son dernier pamphlet « l’architecture est un sport de combat » aux éditions Textuel.
Perso… Rudy Ricciotti m’a totalement conquise et j’aime autant l’homme que l’architecte ! Parce que son travail se distingue autant par sa force plastique que par sa dimension technique et qu’il a surtout l’incroyable vulgarité de dire ce qu’il pense. Une liberté qui selon lui n’est pas du goût de tous.