[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#af7528″]L[/mks_dropcap]es éditions Louise Bottu ont encore déniché une curiosité littéraire. Discernement est le premier texte du traducteur hispanophone Guillaume Contré. Coulé dans un seul bloc, le récit des déboires d’un Frédéric quasi apathique devrait être lu d’une seule traite pour mieux s’y perdre. Guillaume Contré travaille l’absurde et l’art de la répétition pour un résultat drôle et d’un trouble dont seule la littérature a le secret.
Frédéric, ainsi se nomme le héros du livre. On ne se l’explique pas tant il aurait pu s’appeler autrement ou se signaler par un seul F. Cet homme marche dans les rues d’une ville, peu importe laquelle, croise des petites vieilles, des chiens et des hommes avec des chiens en laisse. Il s’arrête dans des cafés, pour en boire une quantité d’ailleurs assez folle. Au cours de cette promenade, il ne cesse de penser et réfléchir au discernement. Son cheminement mental se fait en parallèle avec sa balade urbaine.
Ce discernement que cherche Frédéric est une volonté de rester au contact avec le réel qui se répète comme une temporalité contrôlée uniquement par l’auteur. À force de réflexion, le monde devient plus indistinct. Ce qui entoure Frédéric est comme un oignon, n’ayant de logique que son épluchage.
Avec un style quasi neutre, Guillaume Contré réussit à nous entraîner aux côtés de son personnage dans une réflexion ne pouvant jamais être close. Finalement, à force de répétitions, de petites vieilles et de cafés avalés, on perd conscience du monde décrit. Hormis celle facétieuse de l’auteur, la capacité à discerner devient un siphon métaphysique aspirant toute logique.
On devine Guillaume Contré, sourire aux lèvres, regardant le lecteur groggy refermer le livre.
Discernement de Guillaume Contré
Paru aux éditions Louise Bottu, novembre 2018