J’ai découvert il y a quelques jours un nouveau sport, le power slap. Le principe de cette compétition en mode face à face est relativement simple : un barbu tatoué avec des bras gros comme mes cuisses (et je vous prie de croire que j’ai de la masse à ce niveau) colle une grosse mornifle à son vis-à-vis au même profil morphologique. Le but étant de secouer l’adversaire au point de le mettre totalement KO. Un amusement qui ne sera malheureusement pas présent aux JO de Paris. Alors vous allez me dire pourquoi donc ce préambule dans le cadre d’une chronique musicale ?
En fait, lorsque j’ai eu la chance d’écouter pour la première fois le nouvel album d’Echoplain, la sensation vécue devait être relativement proche de celle de ce type complètement désarçonné malgré le soutien d’un pupitre au couleur d’une boisson énergisante.
Les gars viennent de la ville administrée par Madame Hidalgo et on perçoit assez vite que ça doit bigrement leur peser. Inutile de décrire leur besoin d’exorciser le malaise à travers une masse de bruit, véritable défouloir partagé par celles et ceux qui oseront l’écoute d’In Bones, album concis, radical et brut de décoffrage. Ouais, on l’a fichtrement dans l’os mais, pour le coup, c’est pour la bonne cause.
J’aurais pu naïvement penser que la référence au mannequin Milla Jovovich allait apporter un peu de douceur dans ce monde de sauvages, j’avais juste oublié que Beyoncé avait été traitée à l’identique pour les besoins du long format précédent (Polaroid Malibu) : A la lessiveuse, programme grande vitesse et essorage XXXL. Bref, ça dépote méchamment mais au plaisir d’un soulagement fou car, pour nous aussi, même si la vie ce n’est pas Paname, le nettoyage des oreilles au Karcher s’impose.
Le noise d’influence punk est crade, tendu, souvent sombre… On pense parfois au post-hardcore de Fugazi ou encore aux contemporains de Metz (ces derniers ont dernièrement assoupli leurs déflagrations avec bien plus de nuances). Je note pour des raisons de suggestion curiste le titre Push avec ses coups de bastos dans l’estomac; Disko Boy gratifié d’une trompette désaxée (merci au passage la collaboration de Benoit Malevergne, jongleur chez Tabatha Crash); Bourrinou pour une offrande dont le blase ne trompe pas sur la came.
In Bones dépose sur le comptoir ses effets sans respiration où Emmanuel Bœuf s’érige tel le roi des pédales (fuzz, larsens et tout l’attirail qui fait grincer et grésiller la cellule sur le vinyle), Stéphane Vion de son côté s’acharne sur ses fûts pour un pilonnage labellisé maous tatapoum… Quant à Clément Matheron, il complète le trio avec la fameuse et hybride Bass VI, histoire d’ajouter du mordant à une rage déjà proéminente.
Bref, Echoplain ne fait pas dans la dentelle et ça tombe bien, la formation ne vient pas de Calais. Par contre, je peux vous assurer qu’à la sortie de leur deuxième effort, les plus robustes d’entre nous ressortiront du tumulte carrément groggy.
Crédit photos: Pierrot Conger (pochette) / Hazam Modoff (groupe)
Echoplain · In Bones
Atypeek musik / Araki records / Day off records / Ged label / Zero egal petit interieur / Kerviniou recordz – 5 Avril 2024