[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#77C2B5″]L[/mks_dropcap]a France est bleu blanc rouge. C’est aussi de ces couleurs que se pare cette bande-dessinée intitulée « Et nos lendemains seront radieux« (Hervé Bourhis, Gallimard). La Nation et son avenir sont, en effet, au centre des préoccupations de Sylvain et Marion, deux idéalistes, frère et sœur, devenus proches conseillers de la présidente de la République. Si ce n’est qu’un soir, pour faire valoir leur politique écologiste radicale, ils prennent en otage la plus haute autorité de l’État. Dans cette tragi-comédie, les éléments vont se déchaîner. C’est drôle, original et très sarcastique aussi !
Fort de Bregançon, la Chancelière allemande quitte les lieux à bord d’une luxueuse voiture officielle. Alors qu’une méga tempête s’annonce, la présidente française décide quant à elle, contre l’avis de son état major, de rester sur place. Fatiguée, épuisée, elle entend profiter d’une bonne bouteille de vin et d’un repas bien mérité, partagé avec deux de ses plus proches collaborateurs.
Il y a Marion d’abord. La jeune femme jusqu’au-boutiste aura caché son jeu depuis sa toute petite enfance, marquée par la disparition de sa mère (et des abeilles). Elle sait que l’usage des pesticides, balancés depuis des hélicoptères sur les champs environnants, est à l’origine de ce malheur. Alors depuis, elle prépare sa vengeance, portée par une petite congrégation dont la figure paternelle a pris la tête. Quant à son frère, Sylvain, avec lequel elle entretient une relation plus que complice, il est l’infiltré de la première heure. Élève en Master affaires publiques à Science PO Paris, c’est lui qui met le grappin sur la députée Françoise Metivier, qu’il va coacher jusqu’aux élections…
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La victoire des présidentielles ne constitue cependant qu’une première étape. Et c’est là que le lecteur ou la lectrice que nous sommes appréciera la mécanique scénaristique mise en place. Car jusqu’à présent, cette victoire présidentielle a comme un goût d’inachevé pour les deux militants, lesquels ne cessent d’œuvrer pour qu’un jour enfin, leur programme d’écologie politique totale soit revendiquée par la présidente elle-même.
Au menu de ce programme, ainsi que le décrit le vrai-faux flyer glissé dans les premières pages de la BD, il s’agit de mettre en place des mesures de bon sens : s’alimenter en circuit court, condamner les plus grands pollueurs, etc. D’autres propositions s’avèrent plus « radicales » : fermer temporairement Internet et contrôler les médias, nationaliser l’agriculture… Ce populisme vert peut-il être une voie à suivre ? La présidente va s’y opposer, avant de se laisser amadouer. Démarche sincère ou nouvelle ruse ? Entre doute et duplicité, convictions militantes et menaces de fin du monde, il ne sera facile pour personne d’y voir clair. Un petit jeu de massacre auquel nous prenons dramatiquement plaisir. Car tout ou tard, les armes vont être de sortie et, toute végane qu’elle est, Marion se déclarera même prête à découper la présidente et à manger de la viande !
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À défaut de chanter, ces lendemains annoncés comme radieux, le seront-ils vraiment ? Rien n’est moins sûr à l’issue de la lecture de cette fable politique, où décrocher la lune, même avec la rage au ventre, garantit au pire l’échec, au mieux l’espoir. Ce serait déjà ça. Mais à quel prix ?
Et nos lendemains seront radieux – Hervé Bourhis
Gallimard – 17 avril 2019