[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#8224e3″]A[/mks_dropcap]utant vous l’avouer : le report du concert de Gareth Dickson que vous vous apprêtez à lire ne devait, à l’origine, pas se faire. Je devais simplement aller au concert, l’apprécier ou non, et basta. Mais parfois il y a des circonstances qui font qu’un concert lambda devient autre chose, un souvenir qui laissera une marque probablement indélébile.
Vous allez vous dire que je vais encore sortir les superlatifs, les adjectifs du style intense, émotion, des expressions comme déflagration sismique, les tripes sur la table et autres platitudes que je vous ressors à chaque concert que j’ai trouvé formidable. Là, pour Gareth Disckson, je vais être sympa : sans vous les épargner, je vais vous les faire maintenant. Le concert de Gareth Dickson fut à l’image de ce qu’on pouvait attendre de lui, chargé en émotions, virtuose et intense. Seul sur « scène » avec sa guitare électro-acoustique et ses pédales d’effet (réverbération surtout), l’écossais a revisité son répertoire (quelques chansons d’Orwell Court, d’autres de Quite A Way) avec élégance, parvenant à habiter l’espace et fasciner le public avec ses superbes arpèges et ce grâce à la virtuosité de son jeu faisant croire par moment à la présence d’un second guitariste. De plus, Dickson s’avère très drôle : il essaie de dialoguer avec le public mais se rend compte que son accent écossais le rend incompréhensible. Du coup il tente tout de même d’expliquer que ses chansons sont loin d’être fun, inadaptées à l’esprit de noël et s’en excuse presque. Et enfin, cerise sur le gâteau, il termine le set avec Atmosphere, reprise de Joy Division et hit qui devrait le suivre tout au long de ses concerts.
Voilà pour le concert en lui-même. En quoi est-il resté gravé dans ma mémoire vous demanderez-vous ? Tout simplement par les circonstances dans lesquelles il s’est déroulé.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#8224e3″]D[/mks_dropcap]éjà, restituer le contexte : le concert a eu lieu à Saint Lô, un 23 décembre dans le cadre de la manifestation Au Hasard Des Rues. Le principe en est simple : les organisateurs donnent un point de rendez-vous aux spectateurs et les emmènent découvrir les rues de St Lô. La ballade se termine par un concert, gratuit généralement.
Ici, pour la dix-neuvième édition, rendez-vous devant l’hôtel de ville et point de balade à proprement parler (il faisait froid et humide ce soir là) mais une découverte de la mairie et une première surprise en découvrant une salle laissée à l’abandon dans laquelle nous rejoint Gareth Dickson pour jouer un morceau acoustique juste devant la cinquantaine de personnes un peu étonnée de le voir si près. Ensuite Dickson se joint à la foule pour aller à la salle de conférence et écouter d’autres invités évoquer la culture autour de St Lô (à travers un livre très étonnant sur 90 chefs-d’œuvre présents dans tous les musées du monde écrit par un Saint-Lois ou sur l’élevage ovin des prés salés). Après quelques anecdotes hallucinantes, l’organisateur nous invite à rejoindre Gareth Dickson dans la salle des … mariages … pour se sustenter un peu avant le début du concert. Donc la salle se présente à peu près ainsi : au fond à gauche le buffet, à droite une table sur laquelle se trouve quelques disques (le stand de Discolexique donc), au milieu de la salle une cinquantaine de chaises disposées en arc de cercle, devant cet arc de cercle, deux enceintes, une chaise, une petite table avec des pédales, un micro et derrière la « scène » les baies vitrées donnant sur le marché de Noël de St Lô. Bref, un cadre unique, une ambiance familiale, un vin chaud, quelques amuse-gueules et le concert peut débuter.
Pour le report, voir quelques lignes plus haut.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#8224e3″]O[/mks_dropcap]utre le cadre et l’organisation, ce qui a fait entrer cette soirée dans mon petit cœur de midinette, c’est ce qui vient après. Une fois le set terminé, je me dirige vers la table de Discolexique, prend un vinyle et m’apprête à le faire dédicacer par Dickson, juste à côté de moi. Il commence par me, enfin nous (ma femme, ma fille et moi), demander si nous connaissions sa musique avant de venir ; lorsque je lui réponds par l’affirmative en lui citant Quite A way Away, il ouvre de grands yeux étonnés. Et quand il nous demande si nous sommes du coin, vu que la plupart des spectateurs sont de Saint Lô, il tombe des nues lorsque nous lui disons que nous avons fait près de deux heures de route pour le voir. S’ensuit alors une discussion sur les spectateurs de ses concerts, nos âges respectifs, les quiproquos liés aux accents (notamment pour la compréhension mutuelle) qui dura quelques minutes.
Nous nous apprêtons à prendre congé quand, appuyé par une connaissance virtuelle rencontrée I.R.L lors de ce concert, je lui demande, à tout hasard, s’il ne pourrait pas nous jouer du Nick Drake, connaissant sa dévotion pour l’Anglais et Wraiths, son album de reprises fait sous le pseudo de Nicked Drake. A ma grande surprise il accepte, prend sa guitare en nous disant qu’il ne peut pas jouer au milieu de tous, à cause du bruit. Pour cela il nous emmène dans la salle de conférence à côté, s’assoit sur une table, s’installe, s’accorde et entame From The Morning, à 50 cm de moi et des autres spectateurs Et là, plus encore que lors du concert, les frissons se font nombreux : le jeu de guitare est parfait, la voix un peu moins mais l’émotion est là, plus que palpable. Ça remue les tripes, humidifie les globes oculaires, d’autant plus qu’après il enchaîne avec Cello Song et termine son concert impromptu avec Rider On The Wheel sous les applaudissements nourris du public, amusé et ému, touché par l’accueil lui étant réservé.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#8224e3″]Q[/mks_dropcap]uant à nous, nous repartons sous la pluie, un disque sous le bras, un sourire béat au coin des lèvres et surtout avec cette sensation d’avoir assisté à quelque chose d’unique, un moment privilégié, un bonheur rare, un putain de cadeau de Noël auquel je ne m’attendais vraiment pas, dû à la générosité et à la gentillesse de son auteur. Bref, si 2016 aura été une année de merde sur bien des plans, certaines personnes comme Gilles Meursault (gentil organisateur de la manifestation), Christophe Gr (créateur du label Discolexique) ou association comme La Source (association culturelle Saint-Loise), ont eu l’extrême bonté d’en atténuer les douleurs avec de superbes initiatives. Je ne peux que les en remercier. Et d’après ce que j’ai cru comprendre, pour 2017, le concept devrait de nouveau s’appliquer avec de très beaux invités. Et ce dès février. A très bientôt donc.
Remerciements éternels également à Patrick Kollender pour ses superbes clichés.