– Quoi ? vous n’êtes pas au courant ??
Nathan Amundson sort son nouvel album, I remember everything
– Et alors ?
– Ben… quand même quoi : il sort de nouveau un album digne de son talent après deux disques franchement dispensables.
…Quoi ????
Ah…ouais… j’oubliais…vous allez me dire : mais c’est qui ce Nathan Amundson ? On est obligés de le connaître ???
Bon je vais éclairer votre lanterne : Nathan Amundson est le gars, très sensible, qui se cache derrière Rivulets.
– Ri-quoi ?
Rivulets. Soit un gars, une guitare, une musique rêche, sur l’os et des émotions à la pelle. Soit deux albums en 2002, 2003 (Rivulets et Debridement), deux merveilles slowcore, adoubées par Low (le premier bénéficie de la production du groupe et de la participation des membres, le second également ainsi que celle de Jessica Bailiff).
Après deux errances (you are my home et we’re fucked, 2006 et 2011, pas mauvais mais inintéressant en vue du talent du bonhomme et tous deux bénéficiant des services de Bob Weston), retour au bercail du gars Amundson avec un I remember everything de haute volée synthétisant à lui seul toute la discographie de Rivulets.
Avec ce cinquième album l’américain ne change donc rien à sa formule : un slowcore/sadcore flirtant avec le folk, l’indie rock, l’ongle du doigt de pied dans la rage, la totalité de l’autre pied dans la mélancolie. Amundson fonctionne ainsi depuis son premier album (Rivulets), cultivant une identité, un son propre à lui, creusant son sillon, cultivant son originalité. Malheureusement, dès le troisième album, en voulant changer de cap, oxygéner sa musique, Amundson est parvenu à la rendre plus banale, perdant en intensité, en « extrémisme » (le drone, l’expérimental, le lo-fi des précédents albums ce qu’il gagnait en souplesse, en confort.
I remember everything opère justement un retour salvateur vers le son des premiers albums, délaissant les arrangements « sophistiqués » pour un retour au minimalisme qui lui sied comme un gant. Dès reinforced : delicate on retrouve ce son, cette identité qu’on craignait avoir perdu pour de bon : une guitare nerveuse, tendue, une atmosphère électrique qui ne demande qu’à imploser; ensuite avec into the night c’est le slowcore mélancolique et classieux de Barzin qui s’invite, puis Kozelek via les Red House Painters sur le superbe my favorite drug is sleep. Bref, au bout de trois morceaux, une fois complètement rassuré et conquis, on se dit qu’on vient enfin de retrouver un pote qu’on avait perdu de vue, un gars qui a eu les yeux plus gros que le ventre et l’intelligence de s’en rendre compte, revenant à une simplicité plus que bienvenue. L’album se déroule ensuite entre morceaux folk minimalistes enregistrés dans l’arrière cuisine (is that all you’ve got, carry you), d’autres plus électriques ( l’excellent summer rain partagé entre beauté et tension), épiques ( le superbe hommage Songs Ohiaen : ride on, molina), des ballades slowcore émouvantes ( your own place to ruin) et s’achève sur un wrong all the time simple, minimal, d’une grande beauté, pour lequel on a juste envie de lui dire : « Non, Nathan, cette fois-ci, tu ne t’es pas planté. Et on est même plutôt heureux que tu aies retrouvé la mémoire parce qu’il aurait juste été inimaginable que tu sortes autre chose que cet album. »
And it’s reinforced/and it’s delicate/I’m not delicate/are you ready now ? chante-t-il sur le premier morceau. Après avoir écouté I remember everything dans sa totalité, on se rend compte qu’Amundson fait preuve d’une bonne dose d’humour (bien que ce ne soit pas flagrant au premier abord). C’est justement sa délicatesse, sa sensibilité qui font qu’on est prêts à plonger de nouveau la tête la première dans sa discographie pour en retirer les pépites. Plus que présentes dans ce nouvel album.
Album sorti le 23 septembre disponible sur le bandcamp de l’artiste en vinyle ou mp3.
Très, très, très beau !
Si je te suis largement sur ta chronique de cet album (très bien vu, même si j’ai du mal à voir l’humour mais je l’écoute tellement que ca va bien me sauter aux oreilles), je ne suis pas du tout d’accord avec tes critiques sur ‘You are my home’ et ‘we’re fucked’, deux disques que je trouve totalement merveilleux aussi… 🙂