[dropcap]Q[/dropcap]u’est ce qui fait que chez Addict, comme dans d’autres webzine/magazines par ailleurs, certains chroniqueurs sont capables de se vriller les tympans plusieurs heures par jours pour mettre en avant certaines galettes ? D’aucuns diront la passion, d’autres la curiosité, d’autres encore la recherche de l’émotion et d’autres enfin celle d’un idéal. Si, pour votre serviteur, les raisons invoquées au-dessus sont toutes légitimes (et un peu siennes), il y a une raison qui prime sur presque toutes les autres : la surprise. La musique a, me concernant, cette faculté de me surprendre, m’étonner, me cueillir sur des contrées longtemps abandonnées. Une preuve ? Feral, nouvel album de RVG.
RVG, acronyme de Romy Vager Group, est un trio Australien (Romy Vager, Reuben Bloxham et Marc Nolte) pratiquant une jangle pop tirant sur l’indie-rock et réciproquement. Bref, une formule on ne peut plus commune pour un style bateau et largement éprouvé par bien d’autres groupes il y a plusieurs décennies (on citera au hasard les Pixies, Go-Betweens, Smiths, REM, The Bats, etc …). Pourtant, Feral est une des plus belles surprises de ce début 2020. Pourquoi ? parce que sans renouveler le genre, il le transcende. En suivant un cap d’une grande simplicité : ligne claire et évidence mélodique empruntant aux grands disques du genre (le 16 Lover Lane des Go-Betweens dont on retrouve quelques traces de Quiet Heart sur The Baby). C’est d’une fluidité rare, parfaitement prévisible (tel solo, tel arpège, telle progression harmonique sera à sa place, attendu, mais parfaitement exécuté), chaleureux, d’un charme immédiat, avec quelques débordements sur le post-Punk façon Television voire U2 (Photograph) ainsi que quelques références au rock Australien (Noiseworks par exemple).
Néanmoins, si l’aspect musical est extrêmement classique et efficace ( Christian Neurosurgeon ou I Used To Love You en sont les preuves sonores), ce qui hissera Feral bien au-dessus du lot, c’est la personnalité de Romy Vager. Déjà, d’un point de vue vocal, ce chant androgyne à la Tom Verlaine (il m’a fallu avoir les photos sous les yeux pour admettre que Romy n’était pas le diminutif de Romuald) trouble. Beaucoup. Ensuite quand on jette un œil aux textes, on se dit que pour rien au monde on ne souhaiterait être dans le crâne très perturbé de Romy Vager. Parce que là-haut, c’est à un véritable maelstrom émotionnel auquel nous avons affaire. Un maelstrom tour à tour brillant, féroce, décalé, touchant (Perfect Day), implacable dans son analyse (I Used To Love You), à l’humour omniprésent (on pense au Morrissey vachard des Smiths sur The Baby & The Bottle ou encore au fou furieux Néo-Zélandais Chris Knox).
Voger y dévoile une psyché bien cabossée (qui sera le thème central du disque, d’ailleurs ne prévient-elle pas d’emblée : Come Monday morning, You may find me dead, You may not find my body, But you might find my head) entre mécanismes interprétatifs dérivant vers la parano (Christian Neurosurgeon, Little Sharky), le repli sur soi, la culpabilité, la colère, la frustration, la mésestime de soi, le tout fort heureusement compensé par des accès de lucidité tordants (I can’t concentrate !, I can’t go to sleep, It could be the coffee, But it’s probably the speed chante-t-elle sur Little Sharky ), de tendresse et d’humour salvateurs. Il y a clairement une dimension cathartique dans Feral (notamment dans l’interprétation de Voger, habitée et théâtrale), une sublimation qui lui permet de côtoyer la folie, l’examiner avec une certaine lucidité tout en restant au bord de l’abîme. Et c’est ce contraste entre une musique relativement sage (et somme toute classique) et cette psyché borderline, ces émotions qui débordent de partout, qui rend Feral lumineux, passionnant et pour tout dire très très addictif.
De mon point de vue (et j’ai toujours raison), un des premiers sommets de 2020 en matière d’indie-rock et un des meilleurs disques du genre depuis le Free All Monsters de The Bats. Pas moins.
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Feral – RVG
Fire Records – 24 avril 2020
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Image bandeau : rvg2 / 2020 / Service Presse