Actif sur la scène Noise-Rock depuis 1992, 2014 marque le vingtième anniversaire de la sortie du premier album de Shellac, At Action Park. Vingt ans pour en arriver à ce cinquième effort discographique, Dude Incredible. Une constatation s’impose d’emblée : rien n’a changé. Certes, cette réflexion nous nous l’étions déjà formulée avec les sorties des inoubliables 1000 Hurts (2000) et Excellent Italian Greyhound (2007). Shellac, c’est avant tout une musique ultra codifiée, un dépouillement ultime, une rythmique près de l’os, des silences d’une brutalité rare, des mélodies livrées à des abonnés absents, une musique parfois éprouvante, souvent maîtrisée par une technique que l’on devine ancrée dans l’ADN du groupe à force de répétitions interminables, zéro artifices.
Les neuf titres qui composent ce Dude Incredible sont rêches comme une peau de crocodile. Dès le titre d’ouverture, qui donne le nom à l’album, le riff de guitare implacable donne l’irrémédiable envie d’entamer la danse de la pluie ou, pour les plus raisonnables, de taper du pied en opinant du chef, bière à la main. Compliant, de par sa répétition est un titre accrocheur qui n’est pas sans rappeler un Tool à qui on aurait enlevé ses oripeaux outranciers. La pièce maîtresse, c’est sur le morceau Riding Bike qu’il faut aller la chercher. Titre mid-tempo qui nous rappelle malheureusement ô combien un groupe comme Fugazi manque au paysage sonore contemporain. You came in me et sa ligne de basse fait invariablement penser à Hangin tree, titre de Queens Of The Stone Age chanté par Mark Lanegan sur Songs For The Deaf. Sur All The Surveyors, morceau de bravoure chanté-parlé, difficile de cacher la filiation avec Jesus Lizard. Vous l’aurez compris, Dude Incredible est une expérience sonique dans laquelle l’auditeur se doit de plonger corps et âme.
Bob Weston, Todd Trainer et Steve Albini, fringant quinquagénaire – 52 balais au compteur et pour qui Shellac n’est pas l’activité principale, pas besoin de vous rappeler les albums illustres qu’il a produit – nous offrent un disque encore une fois d’une radicalité extrême. Point question de promotion, de liens sur les plateformes d’écoutes commerciales. Pour les voir en concert en nos contrées, il faudra se lever tôt car ils seront rares, et nul doute que les places seront chères.
Disponible depuis le 16 septembre chez votre disquaire favori.