[mks_dropcap style= »letter » size= »52″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#666699″]L[/mks_dropcap]e 23 mars 2016.
Chère Viviane de Muynck. Je me permets enfin de vous écrire après n’avoir vu que deux pièces où l’on vous retrouve. Peut être est-ce un peu présomptueux de se permettre d’écrire une lettre alors que je ne vous connais pas personnellement et que je n’ai vu que deux pièces dans les 12 pièces de théâtre et 11 films auxquels vous avez participé. Mais voilà, vous y êtes dans ces spectacles et vous y êtes formidablement touchante.
Pourquoi seulement maintenant ? Hier nous étions le 22 Mars 2016 et ce fut une fois de plus une journée éprouvante pour nos pays européens. Les attentats de Bruxelles creusaient encore plus la blessure et la peur. Ce même 22 Mars, j’avais un billet pour un spectacle au TU Nantes. Je vous ai vue apparaître sur cette scène et là, un lointain souvenir m’est revenu. Alors que votre présence dans la pièce de Fabrice Murgia : Children of Nowhere proposé ce soir là, réchauffait nos pauvres corps fragiles, je me suis souvenu de mon émoi, 13 années auparavant, devant La chambre d’Isabella de Jan Lauwers. Il y eut alors une étrange alchimie entre le souvenir et le présent : celle entre deux spectacles où vous y apportez les raisons d’aimer, de vivre, de continuer à croire à la force de l’art face à l’obscurantisme.
De ce souvenir ne me reste que le sentiment heureux d’avoir vu une œuvre magistrale. L’autre pièce que j’ai pu vous voir ce mardi 22 Mars, est un spectacle mêlant documentaire, musique et théâtre. Il raconte l’histoire de Chacabuco , village minier situé dans le désert d’Atacama puis camp de détention où l’on pratiqua la torture sous la dictature de Pinochet, au Chili. Il est maintenant un village fantôme.
À l’arrière scène se trouve quatre violoncellistes et une cantatrice qui vous rejoint rapidement. Un rideau transparent les sépare de l’espace scénique où l’on évolue sur un sol de sable rappelant le désert chilien.
Les images projetés sur les toiles transparentes regroupent les témoignages des Hommes ayant vécu l’histoire tragique de ce village.
La mise en scène reste sobre, donnant à votre présence autant d’importance que les dispositifs de projections et musicales.
Ce fut un spectacle bouleversant. Mais ce qui le fut plus encore, ce fut vous madame, votre présence scénique. C’est souvent ainsi que l’on juge du talent ou non d’un comédien, la façon dont il arrive à capter les regards.
Moi je ne voyais que vous hier. Bien sûr il y avait le quatuor de violoncelles Aton’ et la cantatrice Lore Binon. Mais mes yeux se concentraient sur vous. À la fin du spectacle, vous dites en espagnol « No te impidas ser feliz » et je crois que c’est à ce moment que je suis tombé amoureux de vous. J’espère vous revoir bientôt sur scène, continuer à être heureux grâce à vous, malgré les trajectoires tragiques de l’histoire du monde.
Madame, je continuerais à penser à vous et je serais dorénavant prêt à me déplacer hors de ma ville pour vous voir. Je vous remercie d’avoir pris le temps de lire cette lettre écrite avec la main fébrile d’un admirateur.
Adrien