[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#e24912″]A[/mks_dropcap]hhhhhhh Bill Baird … Bill Baird …
Voilà un peu le portrait type du gendre idéal. Beau petit gars ne payant pas de mine avec ses bouclettes blondes, le mec sympa qu’on croise tous les jours mais auquel personne ne fait attention tellement il semble incarner la discrétion. Pourtant, comme toujours, les apparences sont trompeuses. S’il paraît gentillet, propre sur lui à première vue, quand on jette une oreille à ses disques, c’est autre chose qui apparaît. Un gars parfaitement siphonné, capable de pondre des morceaux psychés complètement barrés, de faire des albums à la santé mentale douteuse sous un patronyme farfelu ({{{ Sunset}}}) ou des morceaux fous et lumineux sous son propre nom. Le pire avec cette histoire, c’est que ça fait onze ans que ça dure. Onze années que Bill Baird nous pond régulièrement un album par an si ce n’est plus. Onze années qu’il propose des disques ambitieux, beaux, devant autant aux Beach Boys qu’aux Flaming Lips.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#e24912″]C[/mks_dropcap]ette année, après une pause d’un an, il sort non pas un mais deux disques, le même jour, sous le même format, Baby Blue Abyss et Easy Machines. N’ayant pas pu jeter une oreille à Baby Blue Abyss (décrit comme un disque crépusculaire par Baird), ce sera Easy Machines (qui se veut l’opposé de Baby Blue Abyss toujours selon les dires de Baird) qui se verra chroniqué en ces lieux.
Pour faire simple, Easy Machines prolonge l’esprit de Spring Break Of The Soul, paru il y a quatre ans, à savoir une pop baroque matinée de psychédélisme, mixture propre à Baird, reconnaissable entre mille, qui touche en plein cœur dès les premières notes.
Ça commence par un Telephones doux-dingue, scintillant de partout, d’une grande richesse mélodique, encapsulant une mélancolie qui brisera son enveloppe sur le morceau suivant, le superbe Quicksilver Slip, mêlant admirablement drone et acoustique. Après, Easy Machines part sur deux directions complémentaires (les trois chansons suivantes) et opposées (le reste).
D’abord avec une première face plutôt mélancolique, un peu laidback comme s’il revisitait l’americana (Be Yourself) ou le catalogue de JJ Cale (Shape Shifting) et plutôt barrée (As The Sun, spoken word qu’on croirait composé par Kozelek et Barrett).
Ensuite, avec une seconde beaucoup plus pop (avec un Never Go Home Again lorgnant sur Lennon), catchy (le tubesque So Says Me), avec des arrangements de cordes rappelant des Tindersticks sous acides (Heaviness In Flames), d’une légèreté par moment stupéfiante (notamment via l’apport du steel band en plus des cordes sur Sound In Your Mind) et amenant une touche baroque à des morceaux à la limite du rachitisme (Sound In Your Mind sans arrangements serait d’une sécheresse dingue).
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#e24912″]P[/mks_dropcap][mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#e24912″][/mks_dropcap]our autant et malgré ses qualités indéniables, Easy Machines n’atteint pas le niveau de Glowing City ou de Spring Break Of The Soul, du fait du caractère apaisé de l’ensemble, mettant un peu en retrait la folie douce de Baird. Néanmoins, et justement grâce à cet apaisement, Easy Machines peut aussi s’appréhender comme une porte d’entrée idéale à son univers si singulier, composé de fulgurances mélodiques pop et de digressions expérimentales parfois ahurissantes. Après, à vous de voir si vous souhaitez ou non prolonger la relation musicale avec Bill Baird. De mon côté je ne peux que vous encourager à le faire, la discographie de l’Américain étant un peu à l’image de son dernier album : imparfaite certes mais foisonnante, passionnante et traversée de réguliers éclairs de génie.