[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]I[/mks_dropcap]ls sont quelques uns, en France, à partager le privilège de conserver une image de jeune homme, comme si le temps n’avait pas réellement de prise sur eux. Antoine de Caunes, Etienne Daho, ou Alain Souchon sont dans ce cas, à des degrés divers. Mais le dernier nommé est bel est bien septuagénaire.
Sans y toucher, Souchon est devenu une institution de la chanson française, dont il a pu apparaître comme un membre de la branche modeste, dénuée de lyrisme excessif et touchant aux préoccupations intimes de la foule sentimentale que constitue son public. Il a pu être moqué pour sa voix à l’opposé de celle des stentors, pour son style aux apparences étriquées ou pour le personnage indécis et indolent qu’on a pu voir en lui. Il est quand même parvenu à se construire une discographie pas si pléthorique en albums, mais comptant tant de chansons qui ont, au fil du temps, intégré le patrimoine musical national.
Au-delà des J’ai Dix Ans (1974), Allô Maman Bobo (1978), l’inoubliable Ballade de Jim (1986) ou Foule Sentimentale (1993), on trouve dans la discographie d’Alain Souchon des petits bonheurs modestes, de J’ai Perdu Tout C’Que J’aimais (1997) et C’était Menti (1999) à La Vie Ne Vaut Rien (2002) et Les Saisons (2008), moins connus mais au moins aussi attachantes.
Ses paroles explorent les embarras du quotidien et célèbrent avec espièglerie les filles, les joies simples, les virées à Sidi Ferrouch ou dans les îles anglo-normandes, les grandes figures comme Ava Gardner, Théodore Monod, Françoise Sagan ou Arlette Laguiller. Mais il n’hésite à traiter également de questions sociales plus graves, dès Poulailler’s Song (1978) sur le traitement réservé aux immigrés. On peut aussi citer, notamment, Et Si En Plus Y’a Personne (2005), sur les crimes commis au nom des religions, et 8 m² (2008) sur la condition carcérale.
https://www.youtube.com/watch?v=qCsCeugXh70
On ne peut pas parler d’Alain Souchon sans évoquer son complice au long cours, Laurent Voulzy. Dans son travail pour son copain, le talent de compositeur de Lolo brille d’autant plus que le traitement est plus léger, moins guimauve que sur ses propres morceaux. Sur leurs albums respectifs, les deux compères se répartissent globalement les rôles entre la composition pour le chanteur de Coeur Grenadine et les paroles pour la Souche, mais ils sont tous deux capables de prendre en charge l’autre partie de l’écriture des morceaux, comme ce dernier l’a brillamment démontré à de nombreuses reprises.
Entre 1980 et 2006, notre homme a mené de front ses activités musicale une carrière cinématographique qui lui a valu une nomination dans la catégorie « César du meilleur acteur » en 1983 pour L’Eté Meurtier de Jean Becker.
Alain Souchon n’a donc pas 75 ans. Il a toujours dix ans, dans sa tête.