[dropcap]I[/dropcap]l faut parfois faire montre de persévérance pour trouver derrière une porte dérobée, l’ouverture sur un jardin magnifique et tremblant de beauté. Mats Gustafson, scandinave de son état, fonde en 2013 le Fire! Orchestra. Tout d’abord axé sur le free jazz et les expérimentations fleurissantes, il va également multiplier les collaborations. Seul ou accompagné de sa formation, il examine à la loupe hérissée de son saxophone baryton, dont il parvient à extraire les feulements d’un félin en proie à la terreur d’un trépas imminent, tous les genres musicaux, avec une grâce mêlée d’une agressivité qui forcent le respect.
Il va travailler avec les noms les plus respectables comme Jim O’Rourke, David Grubbs, My cat is an alien, Thurston Moore ou Merzbow. Autant d’horizons qui semblent nourrir chaque fois un peu plus le champ lexical de son expression musicale. De même, il va étoffer, au fil du temps, le personnel de son navire. Si l’équipage change régulièrement, il en reste le capitaine. Néanmoins, s’il semble établir le cap, il laisse le soin à ses nombreux partenaires de trouver le chemin et d’en élargir les horizons comme si la terre était ronde et ne connaissait pas de barrières. La musique de Fire! Orchestra s’est ainsi prise dans la lumière, et parvient à toucher sans plus effrayer.
Arrival est sorti durant l’année 2019. Les voix soul et l’orchestre, comptant désormais une quinzaine de musiciens, s’offrent l’incroyable luxe de manier le free jazz aride et la volupté soul proche d’un Cinematic Orchestra avec une facilité désarmante. La porte dérobée donne donc sur un jardin fascinant qui alterne chaos cathartique libérateur et retour au calme d’une couleur soul entre émotions fortes pour le cœur et caresses aussi sensuelles qu’intenses pour l’épiderme. La reprise de Robbie Basho, Blue Crystal Fire, vous saisit contre elle comme ce souffle délivrant tout un conte d’émotions divines, alors que Week-ends s’en prend aux racines des continents chauds et bouillonnants qui rapprochent les colères des esclaves.
Fire! Orchestra parvient à une alchimie parfaite entre la beauté qui porte les âmes aux nues, et les terres brûlées que sont les racines spoliées par notre humanité. Les danses s’enchevêtrent, transcendantales et ondulantes, comme un serpent autour d’un bâton, comme une cyme sur le point de déployer mille fleurs pour garnir ce jardin sus-perdu coincé entre l’Orient, la Scandinavie et Chicago. S’entrechoquent alors mille organes inspirants, enfantant une fantasque fresque aux milles saveurs. On pourrait craindre l’overdose de la surenchère, mais les montées free jazz se confondent dans la chaleur des choristes, et s’opère alors une osmose parfaite qui donne lieu à une musique à la fois sensuelle et pernicieusement intrigante. Un gospel écorché, un silence pesant, une complainte décharnée ramenant aux champs de coton, portée par des dissonances de violons sinueux se mêlant comme des corps fiévreux.
Fire! Orchestra livre ici une musique qui donne autant envie de resserrer les cœurs les uns contre les autres que de lever les poings vers des cieux éclairés pour crier le nom de liberté. Il serait dommage, regrettable, intolérable qu’une telle ode à la vie reste suspendue au dessus d’un jardin juste parce qu’une porte s’est un jour dérobée.
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Fire! Orchestra – Arrival
Rune Grammofon – 24/05/19
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Photo ©Johan Bergmark
Quel disque ! Quelle découverte magnifique. Merci Kyle, merci Addict Culture !