[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]A[/mks_dropcap]ujourd’hui tonton Jism vous proposera de revisiter, pour sa trentième année, un disque passé un peu sous les radars lors de sa sortie. Ok, il n’a pas le génie mélodique rugueux de Lee Mavers, n’aborde pas le noise rock LSD paillettes dans les cheveux comme Sonic Youth, est encore moins un pavé sombre électronique et dense comme le Violator de Depeche Mode, ni un disque où les idées fusent à la vitesse de l’éclair (Pixies). Non, il s’agit d’un album d’artisan, lumineux, mélodique, écolo, dont on a quelque peu oublié l’existence : Goodbye Jumbo de World Party.
World Party, c’est le groupe de Karl Wallinger. Écossais né en 1957, l’homme baigne depuis sa plus tendre enfance dans la musique, privilégiant les claviers mais pratiquant bien d’autres instruments. Sa carrière de musicien commence en 1977 quand il intègre le groupe Pax. Cependant, c’est en 1983 qu’elle décolle quand Mike Scott le recrute pour jouer les claviers sur la tournée du premier album des Waterboys. Il participera à A Pagan Place, mettant en avant ses talents de musicien et producteur puis jouera un rôle déterminant sur This Is The Sea, allant jusqu’à influencer le son des Waterboys. En effet, alors que Scott s’orientait plutôt vers des arrangements minimalistes, c’est Wallinger qui va ouvrir le groupe à la Big Music en diversifiant à l’envi les instruments et les arrangements. Lui qui va tant impressionner Scott qu’il finira par inclure un de ses morceaux dans la setlist de This Is The Sea (Don’t Bang The Drum). De ce fait, The Waterboys étant l’objet de Scott, celui-ci voit d’un mauvais œil l’influence grandissante de Wallinger, lui faisant clairement de l’ombre. En 1985, il finit par l’éjecter et le remplace par Guy Chambers pour la tournée de This Is The Sea.
[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]W[/mks_dropcap]allinger est maintenant libre comme l’air, a des idées plein la tête et surtout un CV bien plus conséquent, lui permettant de chercher une maison de disque. Il crée donc World Party en 1985 et arrive chez Ensign. L’année suivante, il sort Private Revolution, exercice pop, folk, soul pas complètement abouti mais très prometteur dans lequel il fait quasiment tout : instruments, production. Quasiment, parce qu’il débauche tout de même deux Waterboys pour l’aider : Anthony Thistlethwaite et le nouveau venu Steve Wickham (intégré au line up en 1985). Cette même année, 1986 donc, du côté du frère ennemi, Scott va, lors d’une tournée en Irlande, tomber amoureux du pays et changer complètement d’optique pour la musique des Waterboys. Plus de Big Music, mais une orientation celtique, rock, folk, parfois minimaliste. Ce changement s’accompagne également d’un changement de maison de disque. Le groupe va quitter Island pour Ensign, label de … World Party. D’ici à ce que Wallinger ait appuyé le groupe pour intégrer le label, il y a un pas qu’on pourrait aisément franchir. Et ce d’autant plus que Scott, sans aller jusqu’à le remercier (faut pas abuser non plus hein), s’inspirera tout de même de Wallinger et le créditera pour l’écriture du morceau World Party sur Fisherman’s Blues. On peut donc légitimement penser qu’en 1988, Wallinger est dans de parfaites dispositions pour entamer la composition de Goodbye Jumbo.
Sauf que … si le contexte personnel semble être au beau fixe, géopolitiquement parlant, c’est autre chose. Bien sûr, l’effondrement du mur de Berlin en 1989 aura apporté un espoir sans commune mesure mais les années 80 auront été celles de la prise de conscience du grand public qu’écologiquement parlant, l’humanité commence à foncer droit dans le mur. Autant dans les années 60/70, les écolos étaient pris pour des illuminés parfois rigolos mais souvent chiants, autant Bhopal en 1984, Tchernobyl en 1986, la tempête anglaise de 1987 ont éveillé certaines consciences et mis l’homme face à ses propres responsabilités. Ce sont ces thèmes, pas forcément légers, qui irrigueront Goodbye Jumbo, comme en atteste le graphisme iconoclaste avec ce masque d’éléphant fait de bric, de broc, de récupération de matériel militaire.
[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]A[/mks_dropcap]ussi, en 1990, ce 24 avril, se pose la question suivante : qui, en Angleterre, voudra écouter un disque à la fois personnel et écolo quand Ride s’apprête à cartonner avec Nowhere, les Happy Mondays se ruiner l’estomac avec Pills & Thrills & Bellyaches, les La’s labourer votre terrain d’une façon plus âpre et extrême ? Et surtout, quand une année plus tôt, Tears For Fears vous a miné le terrain avec son génial single Sowing The Seeds Of Love ? Ben … pas grand monde en fait.
Et c’est bien dommage parce qu’avec Goodbye Jumbo, Wallinger sort un classique immédiat. Le genre de disque qui, malgré ses défauts, traverse les années sans prendre une ride. Normal me direz-vous car, outre les thèmes abordés, plutôt universels (amour, nature, joie, déception, aliénation par les images, peur du futur), Goodbye Jumbo balaie tous les styles musicaux populaires avec une justesse et un talent hors norme. Qu’il empreinte aux Stones (les chœurs de Way Down Now), aux Beatles (Put The Message In The Box, les paroles de Thank You World), à Prince (cette voix haut perchée sur le très soul Ain’t Gonna Come ou le funky Show Me To The Top), qu’il fasse des ballades poignantes (le magnifique And I Fell Back Alone), de la pop mélancolique à souhait (When The Rainbow Comes), des tubes (Put The Message, Way Down Now), l’Écossais vise juste et touche en plein cœur à quasiment chaque morceau. C’est bien simple, une fois que vous avez mis les oreilles dans l’engrenage, il est presque impossible de s’en défaire. D’autant plus que Wallinger, en parfait sorcier du son qu’il est, a pensé Goodbye Jumbo pour que chaque chanson se réponde. Par exemple, la chaleur, l’optimisme de Thank You World s’opposera à la sourde inquiétude d’Is It Too Late (dernier et premier morceaux de l’album), la mélancolie de And I Fell Back Alone à la légèreté de Take It Up (dernier morceau de la face A et premier de la face B), Ain’t Gonna Come et Show Me To The Top seront deux relectures différentes de Prince (la première verra le très mélancolique If I Was Your Girlfriend revu de façon salace, a contrario de la seconde qui verra le Hot Thing prendre un sérieux coup de froid).
Mais bon, au-delà de cette brillante analyse dont je fais preuve depuis un paragraphe voire plus (hum …), ce n’est pas ce qu’auront retenu les auditeurs tombés sous le charme de cet album. Non, ce qui vous saisit d’emblée, c’est ce génie mélodique, stratosphérique sur la première face, cette sincérité désarmante (à l’inverse d’un Lenny Kravitz, autre artiste nageant dans les mêmes eaux que Wallinger et plus orienté sur la suffisance que la modestie), cet amour de la pop dans toutes les largeurs, l’amenant sur le terrain de Dylan sur God On My Side, le faisant embrasser plus loin les Beatles et les Stones dans un même morceau, ou saupoudrer ses chansons d’éléments psychédéliques hérités des grandes heures des 60’s.
[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]A[/mks_dropcap]lors qu’importe si la seconde face est un tantinet inférieure à la première (Sweet Soul Dream, Take It Up sont un cran en dessous du reste), qu’importe s’il n’a pas l’aura des grands disques cités dans l’introduction, s’il n’a pas eu le succès escompté (bien que Way Down Now ait été n°1 aux USA pendant 5 semaines), si la suite n’a pas été à la hauteur, Goodbye Jumbo reste le superbe témoignage d’un artisan à la fois humble et ambitieux, un disque qui, trente ans après, garde toute sa pertinence et son génie mélodique.
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Goodbye Jumbo de World Party
Sorti chez Ensign le 24 avril 1990
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Image bandeau : Capture d’écran youtube
Enfin je trouve un article sur ce fabuleux album qu’est « Goodbye Jumbo », coup de foudre a la première écoute a l’époque et toujours dans ma play list 30 ans après. Je ne vais pas refaire l’histoire, c’est très bien détaillé dans l’article. Les influences sont marquantes mais pas que il a un petit truc qui fait que tout ça est bien assimile mais reste personnel quand même.
Belle année 1990 je me rappelle d’un album de The House of Love (butterfly) ainsi que celui de The blue Aeroplanes « Swagger ».
Aller je vais me reecouter World Party.