Portait de jeunes hommes en groupe ou ce que la disparition d’un enfant (adolescent) fait resurgir des rapports mère-fils, père-famille, ville-habitants.
En s’attachant à décrire les sensations psychiques, intimes, liées à la perte, Hélène Gaudy nous plonge dans des moments d’envoûtements psychologiques et narratifs d’une grande puissance littéraire. Une langue minutieuse et resserrée pour dire l’appartenance à une ville, à un contexte social et générationnel, à une famille, à une bande.
Décrire ce moment d’affirmation et de doute : L’adolescence. Entre Homme et enfant, l’adolescence masculine, le regard des mères sur ces corps en devenir.
Ce livre est un grand et magnifique positionnement sur l’adolescence. Positionnement de la langue, un travail subtil sur l’agencement du verbe, un travail minutieux et rare sur les virgules. Un livre qui se lit avec lenteur, délicatesse, désir de ne pas s’en extraire, désir d’en devenir l’un des personnages pour ne plus quitter Lisbon, cette ville aride rugueuse, suspendue dans la douleur, une ville d’Amérique cristallisant l’évolution des lieux clos, restreints, enroulés sur eux-mêmes, restreignant leurs adolescents, où le rêve est la fuite ( fugue, évasion par l’image, narguer la morte et le danger… ). S’y imprègnent solitude, désœuvrement, nature hostile et incertaine (la rivière).
L’adolescent rêveur, comme un fantôme dans la ville, un miroir de la peur, de l’inachèvement, des douleurs, des vies arrêtées, creuses, des tristesses, des séparations, des pauvretés, des solitudes.
Un livre d’une grande puissance qui voit jaillir et se déployer un style, celui d’Hélène Gaudy jeune auteure française qui impressionne par sa maîtrise, sa justesse et son univers ou s’entremêlent un rapport plastique et poétique à l’écriture.
Plein hiver, Hélène Gaudy, Actes sud, janvier 2014