[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]C'[/mks_dropcap]est à la faveur d’une insomnie que j’ai découvert Hervé. Réveillée bien trop tôt, à cause d’un sale mélange de vague à l’âme et d’exaspération, j’avais machinalement allumé la radio, histoire de faire baisser la tension au fond de mon lit et retrouver les bras de Morphée. Peine perdue, Didier Varrod démarra une chronique musicale qui captiva mes oreilles derechef.
C’est d’abord ce prénom qui me frappa…Hervé. On a vu plus glamour comme nom de scène, même si le prénom est une tendance lourde pour les artistes français. J’avoue, même endormie, ça m’a fait marrer au premier abord et déciller mes paupières lourdes. Mais l’enthousiasme du chroniqueur aidant, j’ai fini par lâcher mes vaines miettes de sommeil, m’asseoir et écouter la musique du dit Hervé. Un son original où un beat électro entraînant et communicatif se mêle à des paroles en accord avec mon état d’esprit d’alors, pas bien jojos quoi.
Mais c’est surtout cette voix si particulière qui me scotcha. Un mélange de hargne et de colère froide, qui refuse l’emphase facile de certains braillards hexagonaux. Hervé reconnait les influences du Bashung des débuts (Pizza) auquel il rend hommage avec sa reprise de La peur des mots et qu’il modernise avec son slam-rap sur les 6 titres de son EP Mélancolie F.C.. Une filiation évidente à l’oreille même si ici le C’est comment qu’on freine a cédé le pas au C’est comment qu’on fonce. Une énergie du désespoir qui saisit illico à la gorge et convie à une danse toute en urgence, pas sans me rappeler un célèbre dépressif bondissant nommé James Murphy.
Le titre inaugural Mélancolie F.C. (F.C. pour Football Club, n.d.l.r.) n’a pas seulement donné son titre au disque. Hymne électro des losers brisés dans leurs rêves, il en explique aussi la genèse. Le gamin de banlieue de Trappes qu’était Hervé doit en effet renoncer à ses rêves de star du crampon après une blessure. Il s’essaie alors à la musique après avoir pris goût aux sons de Daft Punk, LCD Soundsystem ou Larry Heard. Il crée ainsi Postaal, un duo électro-pop français, à la carrière confidentielle. Lors d’une pause entre deux tournées, lui revient en mémoire l’émotion suscitée par son premier concert. Jacques Higelin à la Fête de L’Humanité sur les épaules de son père. Hervé se lance et chante en français sur ses nouvelles créations. Mélancolie F.C. est né.
Cette mise en bouche saisissante est aussitôt suivie par l’entraînante Cœur poids plume qui donnerait presque des ailes au milieu de toute cette noirceur, doublée parfaitement plus loin par l’efficace Dis-moi toi qui me fait taper inévitablement du pied et suivre la cadence, contrairement à son auteur.
Le disque, où aucun des 6 titres ne laisse l’âme et les corps en repos, file à toute vitesse et se clôt en beauté par la puissante Va piano, un titre jungle enlevé qui nous donne envie d’en écouter plus. Frustration agréable, espérons qu’Hervé aille toujours plus loin toujours plus loin !
Mélancolie F.C., un disque à mettre de toute urgence entre les oreilles de ceux qui se reconnaissent dans les bancals sur le banc, dépassés, dépendants, le pansement sur une jambe cassée.
Hervé – Mélancolie F.C.
EP sorti le 17 mai chez Initial Artist Services.
Hervé sera en concert en juillet : le 5 à Paris au Festival Fnac Live, le 10 à Paris au Festival Days Off, et le 12 aux Francofolies de la La Rochelle.