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Au collège, nous n’allions que rarement à la cantine. Au travers de la porte-fenêtre qui donnait sur la cour du fond, telle que je me la remémore, je revois les bouteilles sur les tables prêtes à accueillir les élèves. Des bouteilles de bière à bouchon à vis. De la Valstar. Nous y allions rarement, cela veut dire que nous y allions parfois. Ai-je goûté la Valstar à la cantine ? Probablement. Et je n’ai pas aimé. Amer. Un cri du cœur qui établit en certitude ce « probablement ».
Nous habitions le Nord-Pas-de-Calais, cette région devenue en s’élargissant les Hauts-de-France. J’aurais préféré région Houblon mais qui se préoccupe de mes désirs ? (Et la Nouvelle-Aquitaine aurait été Merlot, Auvergne-Rhône-Alpes : Syrah, la Bourgogne-Franche-Comté : Savagnin, etc.) Pas de bière à la maison mais des litres étoilés dont il fallait rapporter les bouteilles consignées et dont les bouchons colorés était la matière première de la créativité enfantine.
La bière, maman en buvait pendant les vacances, lors de nos haltes pique-nique dans les cafés arborant la pancarte « Ici on peut apporter son manger ». Elle disait que ça calmait sa migraine, déclenchée par les trajets en voiture depuis notre location jusqu’au Mont-Saint-Michel ou à Saint-Malo, nos grandes expéditions annuelles. Nous, nous prenions du Pschitt.
Quelques années plus tard, sa sœur, ma tante, s’est mise à la bière et elle a grossi. Ces deux informations étaient reliées, dans les conversations familiales. Elle était passée à la bière parce qu’elle la digérait mieux que le cidre normand, régal brutal.
Je m’y suis mise peu après. C’était le temps du lycée. Entre les cours nous allions boire des pots dans des cafés qui s’appelaient le Balto ou le Khédive. Souvent les garçons payaient pour les filles. Nous buvions des blondes à la pression. De la Stella Artois, nous vivions en Artois. J’en éprouvais comme une petite fierté.
Étudiante, j’ai travaillé pour un laboratoire agroalimentaire. En particulier, ils fabriquaient de la collu, ce produit qui permet à la mousse de la bière de tenir mieux. Les brasseurs fournissaient des barils, pour les essais. Vers 17h, les techniciens venaient me chercher à mon poste de laveuse de vaisselle. Nous terminions les barils ensemble. Ensuite je traversais la métropole Nord en zigzaguant sur les pistes cyclables avec mon 102 Peugeot. J’ai toujours réussi à rentrer.
Plus tard, j’ai vécu dans la Loire et je suis passée au Gamay. Sauf pendant les allaitements. À l’époque, la bière était recommandée.
C’est à Belleville que je m’y suis remise, avec la Tsingtao. Il y a eu l’époque où nous achetions de grands packs de canettes de blonde ou d’Abbaye que nous buvions avec des hordes d’ados. Désormais mon cabas est moins lourd.
Je me suis souvenue de la Stella Artois en découvrant la bière Estrella dans un faubourg de Barcelone. Bière, étoile. Du Nord au Sud, ça fonctionne. Éclats d’étoile ambrés, lumière d’or, ma richesse non fiscalisée.
J’aime la bière, son friselis rafraîchissant, le joli glouglou qu’elle fait quand je la verse. Elle me désaltère, elle me nourrit. Tu en veux une ? Trinquons !
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Charlotte Bayart-Noé est auteure Litanies du lait publié aux Editions Rue des Promenades (2016).
Elle est la fondatrice et l’éditrice des Editions Rue des Promenades qui a reçu le prix Hors Concours 2016 pour Koumiko de Anna Dubosc.
Merci à elle de nous avoir offert ce texte.
truc
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