[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]D[/mks_dropcap]ifficile, en quelques lignes, d’exprimer le grand vide que laisse Philippe Cerboneschi, plus connu sous le pseudonyme de Zdar, par sa disparition brutale et tragique. Ingénieur du son pointilleux, producteur novateur, musicien inspiré : le nombre de casquettes qu’il aura cumulées au fil d’une carrière qui s’étend sur plus de trois décennies a de quoi donner le vertige.
Difficile de ne pas commencer par le début, à savoir la rencontre décisive, au crépuscule des années 80, avec Hubert « Boombass » Blanc-Francard, alors que Philippe est l’assistant de son père, l’illustre producteur Dominique Blanc-Francard. Le tandem allait s’illustrer les années suivantes aux côtés du rappeur MC Solaar, lui troussant sur mesure, sous le pseudonyme évocateur de La Funk Mob, des instrumentaux à la fois groovy et tranchants qui porteront avec souplesse et habileté la prose combat de la future star en devenir.
Difficile de ne pas mentionner l’incroyable Pansoul de Motorbass, autre duo formé par Zdar, avec le jeune Etienne de Crécy cette fois-ci : publié en 1996 après une flopée de maxis prometteurs et alors que les Daft Punk n’en sont encore qu’à jouir d’un buzz embryonnaire, cet album constituera une véritable pierre d’angle de ce que l’on désignait alors par le terme de French Touch, symbole d’une nouvelle génération de producteurs locaux que ce coup d’éclat contribuera largement à décomplexer au niveau de la scène électronique internationale.
Difficile de ne pas évoquer les multiples sorties suivantes de Zdar et Boombass, qui délaisseront progressivement l’alias de La Funk Mob, synonyme d’instrumentaux hip hop simultanément nerveux et hypnotiques, pour embrasser à pleine bouche et sous la bannière plus percutante de Cassius les sonorités de la house music alors en pleine explosion médiatique à l’aube du nouveau millénaire.
Difficile de ne pas penser à toutes les productions réalisées par Zdar pour un spectre d’artistes d’une largesse stupéfiante, de notre barbu préféré Sébastien Tellier aux explosifs Beastie Boys, de la bouleversante Cat Power aux bondissants Two Door Cinema Club, en passant par les furieux The Rapture ou les éblouissants Phoenix, qui décrocheront en 2010 un prestigieux Grammy Award pour leur Wolfgang Amadeus Phoenix, conçu sous sa houlette : à toutes et tous, il aura distillé sa science à la fois précise et bouillonnante, fluide et massive, cumulant inventivité pertinente et efficacité ravageuse.
Difficile, aujourd’hui, de se dire que le paysage musical français devra désormais compter sans l’un de ses plus fervents artisans, qui aura contribué, souvent dans l’ombre et parfois en pleine lumière, à l’essor d’un savoir-faire et d’une énergie créatrice dont les stigmates et l’influence auront largement dépassé les frontières nationales.
Philippe Cerboneschi est décédé ce mercredi 19 juin 2019 à Paris, et pour lui rendre hommage, tout en transmettant à sa famille et ses proches toutes nos pensées émues et compatissantes, l’équipe d’Addict-Culture a concocté une playlist tentant, fébrilement mais passionnément, de retracer toute l’étendue de son talent, entre compositions originales, productions captivantes ou remixes radicaux.
Au travers de ces quelques titres, se dessine une certaine idée du travail sur le son, comme un don précieux offert au sens profond de l’existence : exigeant, généreux et incarné.
French Godgiven
La playlist est disponible sur Spotify , Deezer et Youtube
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