[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#bd5168″]S[/mks_dropcap]i vous êtes d’assidus lecteurs d’Addict-Culture vous aurez sans aucun doute relevé l’évocation du projet que voici lors de notre « Son du Jour » du 21 Décembre 2017. Mon enthousiaste consœur Ninie Peaudchien profitait de l’annonciateur The Sun Will Go Out pour nous prédire un hiver sans lumière.
À cette époque pré-festive, j’étais trop occupé à dévorer le polar Mörk du romancier Ragnar Jónasson pour plonger mes esgourdes dans l’enchainement de livraisons seyant pourtant pleinement à une énigme emprunte de sombres mystères.
Le cheminement de Team Dreams aura duré une année durant laquelle Sin Fang, Sóley et Örvar Smárason auront joué à l’effeuillage progressif d’une collaboration basée sur le dévoilement mensuel de chaque pièce du puzzle. Chaque mois, le trio composa et publia un nouveau titre. Au final, ce sont donc douze pièces qui vinrent se compiler pour former un album. C’est d’ailleurs cette approche qui pourrait expliquer le côté bancal du disque.
La première offrande intitulée Random Haiku Generator revêt les apparats d’une fusion électro-féérique où les assemblages s’imbriquent parfaitement. Le refrain est chargé de solennité spatiale et, grâce à un bel effort pour étoffer la bagatelle, la douceur qui en découle restitue la parfaite sensation vivifiante que nous attendions.
Les protagonistes sont connus du cercle quasi polaire : Sin Fang, l’électron libre issu de la bande indie-folk Seabear tout comme sa complice Sóley dont la carrière solo n’est plus à louanger (si nécessaire, je vous suggère l’écoute de l’extraordinaire Ask The Deep). Le dernier larron Örvar Smárason n’est autre qu’un des maillons de Múm, autre groupe à ne pas manquer pour les fanatiques de paysages sonores apaisés et mélancoliques (au rayon des pépites du genre je vous laisse le soin de découvrir le saisissant Finally We Are No One). Voilà pour ce qui est du casting de ce side-project boréal !
Ce n’est donc pas étonnant de retrouver, au sein de ces constructions exclusives, un tempo soigné par l’écho échappé de leurs productions respectives.
Au fil de l’écoute, c’est la pureté vocale de Sóley qui finira encore par me faire chavirer. Très souvent, je me fis la réflexion que l’artiste pourrait très bien me susurrer à l’oreille la lecture du bottin sans que cet exercice puisse me sembler saugrenu. Un plaisir le plus souvent magnifié par son timbre enfantin mais qui, maquillé par une surabondance de dématérialisation, finira par gâcher la quête émotionnelle. Dommage !
Le retour humanisé de Wasted permettra de redonner de l’allure au patchwork. Black Screen pourra s’enorgueillir d’une dimension intense, une rythmique électronique qui vous harponne en plein cœur, une efficacité marquée d’une hyperbole sensorielle anobli par le doublement des voix et des chœurs. Dans l’esprit, nous ne sommes pas loin d’une pop glaciale piquée par les codes modernes du R&B.
Pourtant, l’accumulation d’effets triturés fera perdre à la matière sa tentative de profondeur. Le trio reste à la surface sur une mer d’huile (Circus Light) mais c’est souvent pour moduler le contexte entre les essais manqués qui auraient pu nous conduire aux portes de l’ennui et d’autres instants sublimes où un chant éraillé redonne du grain, expulse les carences avec une fluidité entêtante.
Le tout n’étant pas dépourvu d’expérimentations se dressant sur des développements inouïs. L’exemple le plus frappant de ce dilemme peut se résumer dans l’enchainement contrasté entre la pop télécommandée de Tennis et l’éclair de génie sur les dégrisements distingués de Space.
Preuve que Team Dreams n’est pas un disque dépourvu de charme. On lui reconnaîtra la capacité d’enfanter chez les pensionnaires du label Morr Music le pire (cette propension indigeste à tout insuffler d’une robotisation sonore) comme le meilleur : la liberté de ton et l’audace d’une petite musique toujours aussi stupéfiante, quitte à donner par moment le tournis.
L’album est disponible depuis le 19 Janvier 2018