Ça s’appelle Spritz (aux éditions de l’Aqueduc bleu) et c’est signé Robin Le Jean, au dessin, et Bruno Le Jean, au scénario. Fan de comics et de mangas, le fils a mis en image les visions du père, ancien réalisateur de Groland sur Canal Plus. La bande-dessinée, au ton forcément décalé, se révèle pétillante.
Une préface de Jules-Edouard Moustic et Benoît Delépine, les deux protagonistes de Groland, ouvre les premières pages de la BD. Elle vaut son pesant de cacahuètes, naviguant d’une référence à Salman Rushdie et Khomeiny à une autre sur les presseurs de chambres à air et autres bouilleurs de pneus. Une entrée en matière, comme il se doit, pour un ouvrage à la ligne claire et épurée qui met en scène le dénommé et farfelu Hugo Spritz, lequel décide de se faire passer pour mort afin de toucher une assurance vie.
Cette arnaque va le conduire à imaginer tout un tas de stratagèmes et de subterfuges visant à échapper, entre autres, à l’enquête conduite par un redoutable expert en assurance (manchot de surcroît) et aux doutes grandissants de sa famille. Dans cette histoire rigolote et faussement horrifique (puisqu’elle nous fait croiser des morts et les cannibales d’une région éloignée, réputée pour ses coupeurs de tête), un personnage joue un rôle central : la compagne d’Hugo, dénommée Pétula.
Tout à tour indignée, fataliste, combative et maligne, elle va d’abord entrer malgré elle dans la combine, avant de réussir à tirer profit de la situation. Pour cela, elle va jouer des coudes et s’efforcer de ne pas tomber dans les pattes d’Edouard Guignolet, fils de bonne famille, plein aux as et accessoirement vendeur d’immeubles de luxe. Lui n’a d’yeux que pour Petula, qu’il a connue en école de commerce. C’est vous dire le potentiel de réussite, de séduction et de nuisance de ce garçon au tempérament bien trempé. Sauf qu’avec Hugo, et surtout avec le père de celui-ci, pour ainsi dire à moitié barré, la partie ne va pas être si facile à gagner.
Au fil de cette mascarade au ton résolument jusqu’au foutiste, notre héros mort-vivant va nous en faire voir de toutes les couleurs. Amusant et surprenant, Spritz (qui fut au départ un scénario de cinéma primé en 2020 au festival de Valence) a de quoi séduire les amateurs de BD virevoltantes qui préfèrent de loin les histoires enlevées aux récits prises de tête (quoique) !