[dropcap]I[/dropcap]nstallée depuis décembre sur (l’immense) scène de la Seine Musicale, la comédie musicale Starmania, ou plutôt l’opéra rock créé par le tandem Luc Plamondon/Michel Berger promet du grand spectacle. Et vous savez quoi ? Starmania tient ses promesses. Et plus encore.
Un peu d’histoire pour commencer, Starmania c’est d’abord un disque sorti en 1979, regroupant un éblouissant casting : France Gall, Daniel Balavoine, Fabienne Thibeault, Diane Dufresne dont les tubes sont devenus cultes (Quand on arrive en ville, Le blues du businessman, SOS d’un terrien en détresse, Ziggy, Le monde est Stone, Besoin d’amour). Puis le spectacle rassemblant cette troupe franco-québecoise éblouit Paris au Palais des Congrès trois semaines durant, et près de 80000 personnes dans un stade à Montréal, c’est un triomphe! Il y aura ensuite une seconde version avec Maurane dans le rôle de Marie-Jeanne, et l’adaptation en anglais (The world is Stone par Cindy Lauper est devenu un tube international).
En 2022, l’opéra rock est donc » de retour à Paris » et c’est un travail d’orfèvre qui nous est donné à voir. Le metteur en scène (de théâtre, d’opéra et actuel directeur du Centre national d’art dramatique Angers Pays de la Loire)Thomas Jolly est aux manettes, superbement épaulé par Sidi Larbi Cherkaoui aux chorégraphies (directeur du ballet Royal de Flandre et chorégraphe star qu’on ne présente plus), c’est Victor Le Masne (musicien, producteur et arrangeur pour Juliette Armanet, Kavinsky, Gaspard Augé et batteur pour Gonzales notamment) qui signe la direction musicale et les arrangements. Orfèvrerie on a dit ! Et pour saupoudrer le rêve de paillettes, l’ensemble des costumes a été conçu par Nicolas Ghesquière (directeur artistique Femme de Louis Vuitton). Les bases sont posées, place au voyage, la grandeur de la salle plonge le public dans une torpeur un peu enfantine, ça chuchote, et l’on sent monter une certaine fébrilité. Rassurez-vous, je ne divulguerai rien en décrivant simplement l’atmosphère de certains tableaux, c’est d’abord un immense piano sans pianiste qui nous accueille au lever de rideau (un joli clin d’œil à Michel Berger évidemment).
Et l’on découvre le « nouveau » casting avec une Cristal étincelante dans une robe dorée hommage à la tenue de France Gall, des jeunes chanteurs dont on ne sait presque rien, castés à Montréal par Luc Plamondon et Raphaël Hamburger, dont certains ont quand même leur public sur les réseaux sociaux. La réussite réside dans la sagesse de ne pas avoir cherché à ressembler aux interprètes d’origine, dans le jeu comme dans le chant, chacun des personnages est porté par son interprète actuel, et la modernité de l’œuvre n’en ressort que plus fortement.
Choisir pour décor une cité du futur, aux prises entre état policier et xénophobe, et alternative écologiste présentée comme débauchée et peu crédible, ça vous parle ? Sans oublier, au milieu une bande de zonards (on disait comme ça à l’époque) et le fameux Johnny Roquefort « né dans la banlieue nord » qui terrorise la ville la nuit, parce qu’il « n’y a plus d’avenir sur la terre ». Les questionnements incessants des personnages en quête de sens, souffrant de solitude, cherchant en vain des réponses à leurs questions : Michel Berger et Luc Plamondon étaient quand même de sacrés visionnaires ! La scénographie est magistrale, les lumières sont folles (le spectacle mentionne d’ailleurs qu’il vaut mieux l’éviter si l’on est sujet à l’épilepsie, car ça clignote dans tous les sens) et les décors monumentaux, les artistes virevoltent sur ces structures en escalier qui rappellent le Metropolis de Fritz Lang, dans ce monde sombre, sans avenir où même l’air est conditionné.
La mise en scène s’est donné pour mission de replacer les chansons dans l’ordre d’origine et de faire réapparaitre certains personnages disparus (comme le grand Gourou, adversaire politique du triste Zéro Janvier, un milliardaire pro race blanche qui vit dans sa propre tour, ça vous rappelle un truc ?). Les excellents musiciens live portent les partitions de Michel Berger, c’est troublant, touchant, et dans le même temps cet héritage s’efface pour rappeler à chaque titre combien l’œuvre est d’actualité par ses thèmes : écologie, sécurité, xénophobie. Le reste n’est que liberté et désir de vivre, de croire et de chanter, avec des interprètes dont la jeunesse fait un bien fou, rendant hommage à l’essence de Starmania.
Thomas Jolly a su rendre l’opéra rock au public qui le (re)découvrait hier, en s’affranchissant du poids du passé et en lui restant fidèle et rock. On en ressort EVIDEMMENT avec toutes les chansons les plus connues en tête, le coeur un peu en vrac passé par beaucoup d’émotions (quand la voix de France Gall fait une apparition…) et une envie dingue de chanter, de danser sur ces morceaux intemporels. Je suis avec Johnny Roquefort à la vie, à la mort ! Starmania est à voir jusqu’à fin janvier à la Seine Musicale de Boulogne (complet mais la billetterie est ouverte pour 2023) et en tournée dans toute la France. A voir absolument si Starmania joue près de chez vous, courez-y !
Starmania – Michel Berger / Luc Plamondon
[button color= »gray » size= »small » link= »https://www.starmania-officiel.com/ » icon= » » target= »true » nofollow= »false »]Site web[/button][button color= »blue » size= »small » link= »https://www.facebook.com/starmaniaofficiel » icon= » » target= »true » nofollow= »false »]Facebook[/button][button color= »pink » size= »small » link= »https://www.instagram.com/starmania/ » icon= » » target= »true » nofollow= »false »]Instagram[/button][button color= »green » size= »small » link= »https://twitter.com/Starmaniaoff » icon= » » target= »true » nofollow= »false »]Twitter[/button]
[divider style= »dashed » top= »20″ bottom= »20″]
Image bandeau : Toutes les photos sont d’Anthony Dorfmann et ont été obtenus par Starmania