[dropcap]L[/dropcap]e décor est planté. Tout d’abord froid, lancinant, imbibé d’une triste brise. L’épaississement des matières roule alors pour assener de francs coups de masse. Il faut avouer que les électrochocs sont martelés comme jamais. The Soft Moon n’a jamais fait dans l’apaisement et son seul pilote à bord, Luis Vasquez, a toujours allié post-punk fracassant et noirceur optimum, au point de faire vriller la matrice dans une sombre aliénation où nous ne savons plus si c’est le psychisme qui influe sur le son ou inversement.
Avec Exister, pas de changement de donne. A la rigueur, il ne serait même pas délirant de concevoir la bête comme une extraction des effusions tirées de Zeros (deuxième album sorti il y a exactement dix ans). La démarche est radicale et brute. Au titre des zones plus domptables, Become The Lies viendra conquérir un empire avec ses accents new-wave dont la lourdeur rappelle le plus notable de Killing Joke. Une production millimétrée qui transpire le khôl. Tout est exacerbé, intensément attrayant, poussant le chant dans ses retranchements perchés en négatif d’une trame plombée par un état de service noyé par les excès.
Oui, The Soft Moon fait accélérer les mouvements avec ses secousses épileptiques comme l’ivresse de ses cris tirés d’un vécu soudainement illustré par la rudesse de battement fous. Il est difficile pour Luis Vasquez de camoufler sa rage et sa douleur face aux confidences nouvelles qui, bien qu’intimes, ne peuvent demeurées muettes. L’alternance de gris, de noir ou de blanc aveuglant n’est posée que pour transcender l’introspection où le frisson se meut comme le fruit des angoisses. La surenchère s’explique ainsi, dans les courbes aussi bien lacrymales que les éclaboussures sanguinolentes échappées d’un acharnement avec lequel le pic à glace vient transpercer la chaire.
De ce cheminement influé par le désir de jusqu’au-boutisme déchaîné, il n’est pas impossible d’entrevoir la mutualisation d’un parcours semé de maitrise pour combiner les ambivalences. Exister rentre dans ce schéma où rien ne semble évident et définitif, quitte à forcer le trait, quitte à friser la caricature. Qu’importe, le ressenti final est jaugé avec cohérence. Il provoque les stimuli les plus enthousiastes à la lecture d’une telle emprise tenace. L’énergie de NADA transparait ainsi au titre d’une symphonie grinçante et grisante à la fois, arrachant sur son passage les riffs tourmentés, boucles obsédantes et autres « joyeusetés » livrées sans retenue. A l’inverse, Him s’entend comme une nouvelle tentation, celle d’un flirt avec le glam’ explosé dans une allure des plus démoniaques… Signe annonciateur du malaise absolument possédé durant les instants d’Unforgiven.
Bref, The Soft Moon vient encore de nous coller une grosse mandale électro-rock-indus dans les esgourdes mais celle-ci est vraiment de taille. Une chose se libère définitivement de l’ouvrage nouveau et à fleur de peau, ce sentiment que malgré les tourments affichés, Luis Vasquez ne cède pas face à l’adversité. Comme le musicien l’indique si justement:
Juste tenir bon et exister est tout ce qui nous reste.
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Exister – The Soft Moon
Sacred Bones Records – 23/09/2022
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Image bandeau : Matteo Nazzari