[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]V[/mks_dropcap]endredi sur Mer, c’est un morceau découvert l’année dernière et écouté en boucle depuis : La femme à la peau bleue, une ballade électro-pop au rythme lancinant, aux lignes de synthé entêtantes, teintée de quelque chose de très rétro et en même temps d’une modernité affolante. C’est une voix posée, dont on se demande comment elle peut être à la fois si simplement scandée et incroyablement mélodique. Le genre de morceau que l’on réintègre invariablement sur chacune de ses playlists en attendant patiemment la sortie d’un autre morceau, voir d’un EP. Et c’est chose faite, depuis le 24 novembre avec la sortie de Marée basse, sur le – très bon – label Profil de face.
De son vrai nom Charline Mignot, photographe de formation, amoureuse des mots et surdouée en tout ce qu’elle touche (on l’aura notamment vue collaborer avec Hermès ou mettre en musique un show de Sonia Rykiel – rien que ça !). Vendredi sur Mer fait partie de cette génération d’artistes francophones au talent précoce, dont l’apparente nonchalance semble cacher un inéluctable besoin de s’exprimer, une certaine hyperactivité créative et un acharnement au travail qui n’a rien a envier aux générations passées. Ces Fishbach, Angèle, Clara Luciani, Bleu Toucan, L’impératrice, Juliette Armanet ou encore Bagarre (et tant d’autres dont on espère vous parler bientôt) qui, l’air de rien, s’installent dans le paysage musical, et le font pour un bon moment.
Avec Marée Basse, elle confirme un univers lunaire, hanté et presque fantasmagorique. Une pop aux textes millimétrés et un sens de la métrique et du rythme comme on aime à en entendre. D’un morceau à l’autre, tout est fluide, harmonieux, gracieux et obsédant au possible. Le morceau Larme à gauche, par exemple, pour n’en citer qu’un et vous laisser la joie de découvrir l’EP par vous même : le beat est clair, net, précis, la voix posée et le tout d’une telle efficacité que l’on se surprend à écouter le morceau irrésistiblement, en boucle, voire même à remuer les épaules et battre du pied, quitte à faire sourire le grand-père assis en face, dans un train de banlieue triste et froid. Sur l’EP on retrouve Les filles désirs et La femme à la peau bleue dont il faut absolument regarder les clips. À commencer par Les filles désirs, réalisé par Alice Kong, littéralement habité par Jessie Alain et Manon Valentin et qui se révèle d’une beauté étourdissante.
Dans cet univers futuriste et où les mots et les images se répondent et se complètent, Charline Mignot nous parle d’amour déçues, de nuits blanches, de filles amoureuses, de souvenirs flous, de garçons qui pleurent, de regrets à demi avoués et de cœurs brisés. Elle le fait avec un incontestable sens des mots, des phrases et de la musicalité, et elle le fait terriblement bien. On y trouve quelque chose d’Alain Chamfort, d’Étienne Daho, d’Annie Lennox, Supertramp ou Alan Parsons Project, autant de figures invoquées et réinventées, qui mènent à un O.V.N.I. délicat et addictif.
Une pop synthétique, nébuleuse, faite de sonorités dansantes et entraînantes, une galaxie mélancolique voluptueuse dans laquelle on déambule avec délice.