Si la guerre est une invention humaine des plus abominables, il est à titre d’exception de bonne intelligence de ne pas enfoncer les portes ouvertes et de reconnaître parfois les mérites de cet « art ».
Les batailles entreprises par des amazones peuvent alors devenir une source d’inspiration admirable.
Elles sont quatre et viennent de Californie, armées de leur souffle onirique pour le combat intérieur entre monotonie morbide et magnificence rebelle.
Fardées de leurs peintures pas aussi hostiles que l’on voudrait bien le croire, pour un second album éponyme concocté avec l’aide prestigieuse de Flood, producteur émérite de son état.
C’est de cette ambivalence entre apesanteur et mélancolie parfois trouble que Warpaint tire son épingle du jeu. Telles les sirènes venant charmer Ulysse, on ne peut que succomber à leur chant si captivant.
Keep it Healthy est, en ce sens, le reflet d’âmes tourmentées qui recherchent la plénitude. La tentation pour laquelle il est peu aisé de résister. Quête difficile quand le Mal s’y installe. La lutte n’en est finalement que plus belle !
On navigue ici du côté de la cold wave la plus habile, à quelques tranchées de l’esprit des illustres Cocteau Twins. Faculté alors de glisser le spleen dans l’idéal (ou inversement).
Si les miaulements des protagonistes peuvent à la longue s’essouffler, on trouvera une énergie combative sur le très enlevé Disco/Very intelligemment placé au centre de l’opus.
Toutefois, l’album dans son ensemble est plus proche des rêveries éveillées. Ce n’est sans doute pas un hasard si le groupe signé chez Rough Trade a exécuté son œuvre vivante (expérience souvent délicate) en préambule de The XX …
La confrontation des genres encore plus évidente sur Love Is To Die, titre évocateur de cette ambiguïté pourtant cohérente entre quiétude et tourment. On se laisse tout d’abord bercer sans ciller avant de se faire attraper par un refrain plus inquiétant.
Le chant vaporeux qui vient se greffer sur des chœurs tout aussi fantomatiques se prête au jeu de la réponse exquise à cette instrumentation reposant sur des échos aériens. Feeling Alright est de cet acabit, subtilement magnifié par le mixage de l’expert Nigel Godrich.
On se demande alors si derrière un patronyme belliqueux et des visages flous ne se cachent pas une hypersensibilité masquée. Les filles de L.A en tous les cas savent bien s’entourer puisque c’est l’orfèvre Chris Cunnigham qui est au crédit artistique de cet album dont des réverbérations mystiques n’ont pas fini de nous envahir …
Pour devenir des guerrières hors pair, il faut savoir usité de bonnes armes mais aussi de ses charmes.