Georges Orwell et son chef d’oeuvre d’anticipation 1984 revivent sous la plume de Boualem Sansal.
C’est une société sclérosée, complètement fermée qui est décrite ici. La religion obligatoire occupe toute la journée. Impossible de ne pas s’y soumettre.
On vit par quartier et il est interdit de sortir de son quartier.
On a des amis mais ceux-ci sont à l’affût de votre moindre faux pas pour vous dénoncer aux autorités.
Les fauteurs de troubles, ceux qui ont un mot malheureux envers la religion et le prophète Abi risquent une exécution publique.
Aucune question n’est donc tolérée. Seul le bonheur parfait est accepté et, bien-sûr, il n’est pas possible de le questionner.
Le personnage principal de Boualem Sansal, Ati a été élevé en ce sens. Après de graves problèmes de santé, il revient à son quartier, à sa vie tranquille, à ses amis qu’il surveille et qui le surveillent. Mais pendant ses heures de souffrance et son voyage de retour, un changement en lui s’est opéré. Il doute.
A partir de là, le roman de Sansal démarre réellement car avant cela il a décrit très longuement et parfois un peu fastidieusement la société dans laquelle évoluent maintenant les hommes.
Ati se lance dans une enquête, se fait de nouveaux amis qui sont dans la même optique que lui et part dans sa quête. Il ira de découvertes en découvertes.
Difficile d’en dire plus sans dévoiler des parties fortes du roman.
Sansal nous offre un très beau livre, sorte de relecture moderne d’Orwell tout en insistant puissamment sur le poids de la religion forcée qui entrave les âmes et les cœurs ainsi que les cerveaux.
Un livre qui résonne forcément d’une manière particulière.
Il s’écrit dans quelques journaux que Sansal parle d’une société gagnée par l’islamisme fondamentaliste, totalitaire et aveugle. Un lien se dit avec le dernier roman de Michel Houellebecq.
Jamais il n’est question d’Islam chez Sansal.
De mon point de vue, la religion d’Abi pourrait aussi bien être un dérivé de l’islam que du christianisme. La religion, on prie neuf fois par jour en Abistan, n’est qu’un prétexte pour tenir les hommes, les empêcher de penser par eux-mêmes.
En cela, Sansal donne à lire un roman très moderne et qui nous questionne profondément.
2084 la fin du monde de Boualem Sansal, aux éditions Gallimard, août 2015
Il faut tout de même faire un gros effort pour passer outre les références à l’Islam, entre les femmes qui portent un « burniqab » ou le muezzin (dont le nom a dû être changé, je ne me souviens plus bien) qui appelle à chaque fois à la prière…
J’ai trouvé, au contraire, que c’était si grossier et transparent que Sansal ratait parfaitement son coup.