[dropcap]A[/dropcap]daptation du roman éponyme de Jeffrey Eugenides paru en 1995, The Virgin Suicides débarque sur les écrans le 27 septembre 2000. Premier long métrage de la désormais célèbre Sofia Coppola, fille du grand Francis Ford Coppola, ce coup d’essai est un coup de maître pour la jeune réalisatrice, jusqu’alors actrice et styliste.
Lorsque Sofia Coppola, tombée amoureuse du texte de Jeffrey Eugenides, débute l’écriture du scénario, les droits du roman ont pourtant déjà été cédés. Mais la jeune femme est déterminée. Son travail achevé, elle le soumet à son père, lequel, subjugué par la qualité du scénario, décide de produire le film avec sa société de production. Convaincus eux aussi, les ayants droits leur cèdent finalement les droits du livre.
Souvenez-vous… Tout commence dans une ville américaine tranquille et puritaine des années soixante-dix, par le suicide raté de Cecilia Lisbon (Hanna R. Hall), treize ans. Elle est la cadette des cinq filles Lisbon, aussi différentes les unes que les autres, parmi lesquelles Therese (Leslie Hayman), Mary (Andrea Joy Cook), Bonnie (Chelse Swain) et Lux (Kirsten Dunst).
Cinq copains passent le plus clair de leur temps à épier les cinq sœurs, demoiselles aussi belles qu’éthérées, tenues sous la coupe de parents étouffants. Madame Lisbon (remarquable Kathleen Turner, effrayante dans ce rôle de mère castratrice), autoritaire et puritaine à l’excès, impose à sa progéniture des règles de vie très strictes, apparemment approuvées par son mari (James Wood), un homme effacé, professeur de mathématiques et passionné par l’histoire de l’aviation.
Cet incident tragique éclaire d’un jour nouveau le mode de vie de toute la famille. Petit a petit, les Lisbon se referment et les cinq sœurs reçoivent rapidement l’interdiction de sortir. Alors que la situation s’enlise, les garçons envisagent de secourir les jeunes filles. L’histoire, relatée par l’un des garçons, des années après le drame, ou doit-on dire les drames, dépeint sans concession aucune la vie adolescente et suit fidèlement le roman dont elle s’inspire (que je vous engage à découvrir si ce n’est déjà fait).
A travers le prisme des souvenirs qu’ont gardé les garçons de cette époque et les méandres de la mémoire, le film prend une dimension toute particulière, oscillant entre réminiscences, rêveries, flash-back et fantasmes. Loin des téléfilms adolescents fleur bleue que l’on connaît, si non exempt des fameuses « traditions » auxquelles nul collégien ou lycéen américain ne saurait se soustraire, l’adolescence est ici dépeinte comme une terre étrangère dont on aborde les rivages sans savoir ce qui nous y attend et dont l’on peut ne jamais revenir.
Un esthétisme magnifique, une ambiance à la fois éthérée, moite, pesante et sensuelle (qui deviendra la marque de Sofia Coppola), un scénario d’une grande consistance et des personnages remarquablement incarnés servent ce premier film magistral, devenu culte. La bande originale d’anthologie composée par Air, qui accompagne le scénario, ne fait que renforcer l’aspect enivrant et fascinant de l’oeuvre. En bref, même 20 ans après, on en sort retourné, ému et définitivement conquis. Un film à voir ou à revoir.
Super texte Sandrine ! 🙂