« Toute la littérature moderne américaine découle d’un livre de Mark Twain intitulé Huckleberry Finn… Il n’y avait rien avant. Il n’y a rien eu d’aussi bon depuis », écrivait Ernest Hemingway.
Que tous ceux qui sont d’accord avec le grand Ernest lèvent la main ! J’en suis, évidemment. De son vrai nom Samuel Langhorne Clemens, écrivain, essayiste et humoriste américain, le père des formidables Tom Sawyer et Huckleberry Finn naquit le 30 novembre 1835 dans le Missouri et mourut le 21 avril 1910. Orphelin de père à l’âge à douze ans, il est obligé de travailler : le voilà d’abord apprenti typographe, rédacteur d’articles dans le journal de son frère, bientôt pilote de bateau à vapeur sur le Mississippi ! Le saviez-vous, c’est de cette époque que viendrait son célèbre pseudonyme : alors qu’il tirait la corde de sondage pour vérifier la profondeur du fleuve, le capitaine criait « Mark Two !, Mark Two ! »(Marquez deux brasses !) pour signifier que le navire pouvait avancer.
Refusant de se battre au côté des sudistes pour le maintien de l’esclavage, Mark Twain s’enfuit vers les montagnes du Nevada et devient chercheur d’or. À partir de 1864, il travaille comme reporter à San Francisco et se déplace en Europe en tant que correspondant de presse. Après son mariage en 1870, il s’installe à Hartford, dans le Connecticut, et est encouragé à écrire par le succès de sa nouvelle humoristique La Célèbre Grenouille Sauteuse.
Après avoir fait les récits de ses voyages en Europe et en Polynésie (Les Innocents à l’étranger, 1869) en se moquant des préjugés et de la conduite de ses compatriotes, et de ses aventures de chercheur d’or (À la dure !, 1872), il publie en 1876 ses souvenirs sur le Mississippi sous la forme d’un roman cette fois : l’inoubliable Tom Sawyer. L’histoire de ce gamin astucieux, débrouillard et téméraire qui rêve de chasse au trésor, joue au gangster, tombe amoureux et fait des blagues stupides va lui permettre d’acquérir une renommée internationale.
En 1885 paraît son deuxième chef-d’œuvre, Huckleberry Finn. Le jeune garçon apparaissait déjà dans les aventures de son ami Tom. Le roman conte cette fois à la première personne les mois de vagabondage fluvial sur le Mississippi d’un gamin illettré, abandonné par son père alcoolique, en compagnie d’un esclave. Quête de liberté, voyage initiatique, les aventures pleines d’énergie, de drôlerie et de vitalité du jeune héros ont enthousiasmé des générations de lecteurs.
Il aura fallu attendre cependant les traductions du grand Bernard Hopeffner chez Tristram en 2012, que je vous engage vivement à lire, pour découvrir enfin en France toute la subtilité, l’originalité et la profondeur de l’œuvre singulière et puissante de ce grand écrivain, mêlant les dialectes des esclaves, les grossièretés des voyous du Mississippi, les fautes de syntaxe de gamins qui ne pensent qu’à faire l’école buissonnière. Décrivant avec réalisme et lucidité la société américaine de son temps, Mark Twain est l’un des premiers auteurs à avoir utilisé la langue parlée authentique des États du Sud et de l’Ouest dans ses romans et excelle dans le registre de la littérature américaine dite régionaliste.
Il écrit également des textes plus graves et plus sombres, dénonçant les excès de la civilisation et l’immoralité érigée en morale. C’est aussi un pamphlétaire virulent et irrévérencieux, notamment lorsqu’il s’en prend à Dieu, à la religion et aux fondements du christianisme. En bref, Mark Twain est un écrivain prolixe et novateur aux multiples facettes, entré au panthéon des grandes voix de la littérature américaine, à découvrir ou redécouvrir.