[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]C[/mks_dropcap]e premier roman a su émouvoir bien des lecteurs lors de la rentrée littéraire de 2015. Paru depuis dans la belle collection de poche « Piccolo » des éditions Liana Levi, vous pouvez l’offrir généreusement à vos proches en cette période de Noël. Vous leur feriez véritablement un beau cadeau car l’écriture est vibrante, forte et sincère.
Didier Castino s’adresse à son père Louis qui, de l’âge de 16 ans jusqu’à sa mort accidentelle en 1974, travailla en tant qu’ouvrier aux Fonderies et Aciéries du Midi. Il redonne vie et parole à cet homme représentant d’une catégorie de travailleurs qui s’éteint. Hommage poignant aux origines, hommage poignant à cette « caste » fière et abusée et aussi soif de s’affranchir de la douleur de l’absence d’un père trop tôt disparu.
Louis Georges Edmond Catella nous parle, ainsi qu’à son fils, dans un monologue post-mortem révélant une époque aujourd’hui bien révolue, celle où l’on entrait à l’usine la tête haute, mesurant la valeur du travail qu’on allait y accomplir : « J’ai vraiment existé à partir de l’usine, comme si je venais d’elle. Excuse-moi d’insister, mais c’est par elle, l’usine, que j’ai pu savoir, grandir enfin et devenir un homme ».
Il est estimé de ses collègues, devient une figure d’autorité d’autant plus qu’il s’engage dans les combats de 1968, et s’en remet au parti communiste comme il s’en remet à Dieu. Découvrant les mots, le pouvoir de la parole qui mobilise les camarades, il touche à ce qu’il appelle « L’Idée » qui permettrait d’abolir ces insupportables différences de classes.
Comment se situer par rapport à un père aussi respectable, qui prend tant de place dans son exemplarité puis dans sa brutale absence (il meurt d’un accident d’usine quand le narrateur a 7 ans) ? D’abord, Didier Castino déboulonne cette figure de père-héros en le faisant revivre à sa façon, en lui inventant des mots. Il conjure ensuite sa mort en le faisant dialoguer avec l’enfant qu’il était et l’homme qu’il est devenu. Il finit enfin par le faire taire pour s’en affranchir et se sentir exister.
C’est un roman qui bouscule, à la fois intime et qui se partage, un très bel espace de parole, collective et individuelle, qui s’affirme, se déploie au fil des pages. Offrez-le, vraiment, il sonne particulièrement juste.