J’ai découvert Arvo Pärt à la Folle Journée de Nantes par une œuvre pour piano qui m’avait énormément touché. J’étais donc dans un état d’esprit curieux pour aller écouter Kanon Pokajanen, une œuvre pour chœur de ce compositeur ! Le public, plutôt étonnamment jeune pour un concert classique assis à la cité des congrès, était venu écouter Arvo Pärt, le compositeur contemporain le plus joué dans le monde, inspirant des artistes aussi différents que Keith Jarrett ou Steve Reich, créateur du style tintinnabuli.
Le chœur entre sur scène, les 13 femmes au premier rang vêtues de robes noires avec un empiècement soyeux à l’avant, très minimaliste et austère. Les 13 hommes au deuxième rang, puis le chef, Tõnu Kaljuste entre à son tour, un charisme impressionnant, visage fin, nez aquilin et cheveux gris en mouvement !
La première partie est la découverte de la mélodie qui sera reprise par la suite dans toute l’œuvre. C’est aussi le premier bourdon qui fut l’un des moments les plus touchants, créant des harmonies dissonantes puis se résolvant. La deuxième partie m’a permis de mieux savourer l’échange entre les altos et les ténors, une magnifique complémentarité. La troisième partie, m’a étonné car j’ai compris que l’œuvre était une répétition perpétuelle mais m’a aussi permis de mieux prendre conscience de la présence des voix des basses, profondes et rocailleuses opposées aux voix célestes des sopranos. Enfin, la cinquième partie, avec un passage à trois choristes, un ténor et deux altos, fut l’acmé de l’œuvre, un moment parfait par l’harmonie des voix et un crescendo rappelant Gorecki. Puis, la tension disparut dans un mouvement apaisant.
Les sonorités m’ont semblé froides et presque religieuses, contrairement à l’image plus accessible des musiques de film que j’avais pu avoir dans les oreilles. En effet, Arvo Pärt a composé cette œuvre sur commande pour le 750ème anniversaire de la Cathédrale de Cologne à partir d’un dérivé d’un Canon de Repentance, textes liturgiques de l’église orthodoxe. J’avoue que j’ai été troublée par cette œuvre si froide et qu’elle m’a peu touché. A l’image des icônes religieuses orthodoxes que je trouve si belles mais dont les visages sont si peu humains, si peu expressifs, le Kanon Pokajanen est d’une beauté virtuose mais peu touchante. Malgré mes études musicales, j’aime à ne pas trop intellectualiser mon ressenti pour la musique. Je suis très sensible aux harmonies et peu importe l’arrangement ou le style musical si les mélodies me touchent. Je n’ai donc malheureusement pas été émue par le Kanon Pokajanen mais très impressionnée par la prestation du chœur. La direction du chef, Tõnu Kaljuste , mondialement connu, a magnifié la simplicité et la sérénité de l’œuvre suscitant une certaine fascination mystique, assez troublante.