Longtemps à la lecture de Baignades, d’Andrée A. Michaud, je me suis demandé à quoi rimait ce déferlement de violence. Pourquoi l’autrice nous donnait ces détails sordides. Où allait-elle nous amener en décrivant si rudement les chairs tuméfiées. J’avais l’impression de revivre le film Delivrance. À tel point qu’au bout d’une cinquantaine de pages l’abandon n’était pas loin. Trop. Nausée. Et la présence d’une enfant vivant la violence des hommes n’aidait pas à lire la suite.
Mais je voulais que cette petite Charlie survive, je voulais que Hank périsse. Que Laurence s’en sorte. Je l’espérais. J’aurais donc pu abandonner et me faire mon propre scénario. J’ai continué.
Max, Laurence et leur petite fille arrivent pour leurs vacances dans un camping. Deux événements imprévus poussent Max à le quitter précipitamment en emmenant sa famille, malgré la tempête sévère annoncée et qui commence déjà.
Mais la forêt est grande. Ils se perdent et Max met son van dans une ornière. Enchainement fatal qui conduira au déferlement de violence décrit plus haut
« C’est ainsi qu’il avait décidé de les appeler, la femme et la fille, refusant de prononcer leurs prénoms, de les inclure dans une réalité plus étroite où il aurait été forcé de tenir compte leur identité. La femme et la fille, pas la femme et l’enfant, pas la femme et la petite, surtout pas la petite, ce dernier mot évoquant pour lui une innocence qu’il n’aurait pu combattre. Il pouvait s’opposer à la force, à la bêtise, à la violence, mais pas à l’innocence, pas à la fragilité. »
─ Andrée Michaud, Baignades
La deuxième partie du livre éclaire la première et même si Andrée A. Michaud a poussé très loin son propos, cette suite de livre nous fait mieux comprendre où elle voulait aller. Une réunion de famille, quelques années après le drame vécu dans la première partie, vient clore ce petit livre de quelques 230 pages.
« Mais à quoi bon étalier leurs blessures au grand jour. Sous leurs masques souriants, ils se jouaient la comédie, se mentaient effrontément pour préserver cet équilibre précaire sur lequel reposait l’harmonie familiale. »
─ Andrée Michaud, Baignades
Et finalement, sans trop en dévoiler, on se demande où est la plus grande violence ? Dans la folie des hommes ? Dans le jugement d’une mère qui ne sait faire autrement que de se mêler des affaires très intimes de ses enfants et surtout de celles de sa fille ? Dans les idées que les hommes masculinistes veulent absolument imposer aux autres et en premier lieu aux femmes.



