[dropcap]L[/dropcap]a version originale du Champion nu est sortie au début des années 90, sous la plume de Barry Graham, dont Le Livre de l’homme, sorti en 2016 chez Tusitala, avait déjà marqué les esprits. Barry Graham, ex-boxeur, journaliste et moine bouddhiste, a quitté son Écosse natale en 1995 pour s’en aller vivre aux Etats-Unis, et a fait son voyage de retour en 2016, au moment de l’élection de Donald Trump. Le Champion nu se déroule entre Glasgow la sauvage et Edimbourg la bourgeoise, dans le milieu de la boxe. Qu’on se rassure : il n’est pas nécessaire d’aimer le noble art pour lire ce Champion nu où Barry Graham fait une fois de plus la preuve de la justesse de sa perception et de la précision de son style.
Le narrateur, Billy, est un ex-boxeur reconverti dans le journalisme sportif. Il vit à Glasgow avec sa compagne Karen, dans une relation aussi déséquilibrée que l’est la malheureuse Karen, loin de se douter que son ami songe à la quitter. Heureux hasard, Billy va pouvoir souffler, « faire le point », « prendre du recul » comme on dit : il va devoir passer un peu de temps à Edimbourg, où le boxeur Ricky prépare le match de sa vie. L’idée : raconter pour les lecteurs de son journal le déroulement de cette période d’entraînement, et éventuellement écrire un livre. Pour cela, il faut être en immersion. Billy va faire du zèle : l’entraîneur de Ricky lui demande d’accompagner son poulain dans son entraînement. Voilà Billy installé à Edimbourg, sans Karen mais près de son meilleur ami Alan.
La ville la nuit, sous la pluie, est pareille à une belle chanson qu’on se sait incapable de chanter correctement. »
Barry Graham
Barry Graham a ses trucs personnels pour nous familiariser avec ses personnages, et en particulier les allers-retours dans le temps, grâce auxquels il nous en apprend davantage sur l’enfance de son héros, son adolescence et ses débuts.
« J’étais un lecteur vorace depuis mes seize ans environ. Avant cet âge, j’étais semi-analphabète (et quelques éditeurs, manquant de bienveillance, diraient que les choses n’ont guère changé. »
Il raconte son histoire avec des mots simples, efficaces, directs, des dialogues savoureux, et parvient à créer d’emblée une atmosphère dans laquelle le lecteur est littéralement happé, qu’il s’agisse des lieux – Glasgow et Edimbourg – ou des milieux dans lesquels évoluent les personnages – la boxe, le journalisme. La séduction est insidieuse : elle s’exerce avec aisance, et nous, lecteurs, sommes vite accrochés à l’hameçon ; le roman se lit vite, et, mieux encore, se relit avec délectation.
Graham n’a pas son pareil pour décrire les relations qui se construisent, se déconstruisent et finissent par survivre, les incertitudes, les entre-deux – Billy tour à tour aime, n’aime plus, aime quelqu’un d’autre, reste, part, renonce. La géographie des sentiments n’est pas une science exacte, derrière la légèreté, tapie dans l’ombre, la tristesse guette, avec son amie l’angoisse et sa compagne la lâcheté. A mi-chemin entre Irvine Welsh et les auteurs du mouvement des angry young men, Barry Graham occupe une place bien à lui, et nous livre une vision du monde aussi lucide qu’émouvante.
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Le Champion nu de Barry Graham
traduit par Clélia Laventure
Éditions Tusitala, janvier 2021
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