[dropcap]P[/dropcap]remier roman graphique d’Enrico Marini, Noir burlesque fait régner le crime et la violence à coup de balles et de battes. Dans cet univers hérité des films américains des années 50, on fait la connaissance de Slick, qui vient de foirer bien malgré lui le braquage d’une bijouterie, mais aussi de son amoureuse d’avant-guerre, Caprice, une vedette de cabaret prête à tout pour réussir. Au milieu de ce couple infernal vient se planter la figure de Rex, un boss de la mafia qui partage désormais sa vie avec Caprice.
Le décor est ainsi planté et magnifié par une bichromie oscillant entre noir profond et rouge sombre, à l’image du sang, de la robe et de la chevelure de l’héroïne. Cet ouvrage se regarde donc autant qu’il se lit.
Les cases occupent parfois un volume important, s’étalant régulièrement sur de pleines pages, nous laissant le loisir d’explorer le moindre détail et de se familiariser avec l’ambiance. Voiture d’époque, vue plongeante sur l’escalier de l’hôtel où s’est réfugié Slick, immenses tours se dessinant en arrière-plan d’une scène de retrouvailles… Les éléments graphiques sont soigneusement travaillés. La sensualité est de mise. Le découpage est au cordeau.
Côté personnages, ils affichent un caractère bien trempé. Slick n’est pas un ange et ne se laisse pas faire, quitte à se prendre des coups de poing dans le buffet. On se plaît donc à le suivre pour savoir comment il compte échapper à son commanditaire, auquel il doit encore un petit paquet de fric. Quant à Caprice, qui ne cesse de jouer de son charme et de son attirance ambivalente pour les mauvais garçons, elle adore visiblement jouer avec le feu. L’étau ne cesse pourtant de se resserrer autour d’elle, nous laissant croire qu’il lui arrivera tôt ou tard quelques bricoles.
Pour couronner le tout, moult détails viennent enrichir le récit. Un matou qui rôde tranquillement, deux tueurs qui font irruption dans une chambre d’hôtel, un inspecteur irlandais qui perd son sang-froid dans un café du centre-ville… Les éléments s’ajoutent les uns aux autres, tranquillement mais efficacement.
Une impression cinématographique se dégage forcément de cet ensemble. Il est vrai qu’en multipliant les plans larges et les plans rapprochés, en s’inspirant des modèles du genre et en prenant le temps de dérouler son récit, l’auteur a tout fait pour ! Voila pourquoi il se dégage de Noir burlesque une agréable sensation et un vrai plaisir de lecture.