Tout le monde connaît Carmen… l’histoire de cette cigarière gitane aux amours passionnées et changeantes.
Tout le monde a chanté ou fredonné les airs de Carmen : Toreador, L’Amour, La Garde montante…
Mais à Orange, le spectacle est partout:
– dans le cadre, lieu mythique et magique où Auguste nous observe et où chaque pierre vibre d’une histoire et d’une émotion séculaires,
– dans le public, où se presse une population mélangée, entre les ayatollahs de l’opéra qui incendient quiconque ose éternuer, les locaux qui sont nés avec cette dimension particulière que les Chorégies offrent à Orange et les citoyens du monde, amateurs plus ou moins éclairés,
– dans la Cavea, où l’orchestre philharmonique de Radio France est grandiose, et garde toute sa majesté jusque dans la bataille contre le vent,
– dans les rues, où vendeurs de coussins côtoient les provençales en habit.
Le monde entier se retrouve à Orange, le temps des Chorégies, et la première richesse que l’on reçoit est liée aux rencontres.
Il faut dire que c’est le it-lieu du lyrique, et qu’on ne peut pas reprocher à la programmation ni au casting de dérouter par des choix trop originaux: Aïda, Tosca, Rigoletto, Faust, Turandot, La Bohème… interprétés chaque année par les stars lyriques du moment.
La soirée à laquelle j’ai assisté n’a pas dérogé à la règle, puisque Carmen est sans doute l’opéra le plus populaire au monde, et qu’on retrouvait sur scène les étoiles montantes du moment : la mezzo soprano Kate Aldrich dans le rôle de Carmen, la soprano Inva Mula pour Micaela et Jonas Kaufmann pour Don José. Les trois plus grands actuels à l’unanimité.
Toutefois, la scénographie de Louis Désiré a divisé le public d’Orange, puisqu’une partie l’a accueilli avec des sifflements à la fin de la représentation. Sans doute les cartes qui jonchaient la scène ont pu dérouter le public classique, et je me suis même demandé si elles ne gênaient pas l’acoustique du mur de scène… En revanche, j’ai adoré le raffinement et l’ingéniosité des costumes, la symbolique des couleurs et des flammes.
Pour ce qui est des chanteurs, Jonas Kaufmann, aussi délicieux à regarder qu’à écouter, a remporté un triomphe. Il en va de même pour Inva Mula, dont le personnage n’était que peu présent sur scène, mais le rôle de Micaela est connu pour être très exigeant vocalement, et sa performance a mis tout le monde d’accord. Quant à Kate Aldrich dont c’était la première venue à Orange, elle n’a obtenu qu’un succès frileux : elle est très belle et sa voix est superbe, mais le personnage de Carmen, même volontairement édulcoré de tout excès folklorique par la mise en scène, exige davantage de tripes et le public l’a un peu boudée en applaudissements.
Un mot pour terminer sur les musiciens, dirigés par le pétillant Mikko Franck : il était difficile par moments de ne pas s’attarder sur eux et de revenir à la scène tant ils nous ont enchantés.
Une soirée sous le signe du raffinement à tout points de vue.
En un mot, malgré des tarifs rapidement prohibitifs si on veut s’approcher de la scène, le mistral qui s’invite souvent de façon mémorable, et une partie du public dont le snobisme est distrayant, chaque soirée est absolument magique et on sort du théâtre antique impatient de la programmation à venir !
Prochain rendez-vous dont je vous parlerai : Roberto Alagna, chouchou du public d’Orange, dans Il Trovatore de Verdi qui a eu lieu en Août. Et 2016 s’annonce savoureux : Madame Butterfly de Puccini, le Requiem et La Traviata de Verdi…
La magie est en marche.
Moi j’y serai…
Site officiel des Chorégies d’Orange