[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]L[/mks_dropcap]e deuxième roman de Timothée Demeillers commence par la prison. Celle où Erwan, le jeune narrateur, est enfermé depuis deux ans. La prison et les souvenirs des abattoirs. La chaîne qui claque, le bruit de cette chaîne, le bruit de la prison, la solitude de de l’enfermement et celle du travail et l’odeur du sang des bêtes. Premières pages époustouflantes de deux traumatismes.
Pourquoi Erwan est il en prison pour 18 ans, nous ne le saurons pas tout de suite. Il égrène ses souvenirs et sa douleur. Le travail bien sûr mais aussi ses relations avec sa famille. Sa mère étouffée par son mari, comme absente tout en étant là physiquement, son père dominant et prenant toute la place et enfin son frère avec qui il partage tout sauf ses mots.
Le début de Jusqu’à la bête nous met simplement KO debout. Comme le clac de l’abattoir si bien décrit par l’auteur et les odeurs.
« C’est toujours l’odeur dont je me souviens d’abord. L’odeur qui imprègne tout. L’odeur qui vous prend sur le parking. Dès qu’on ouvre la portière. Encore que je ne la sentais plus, moi à la fin. Seulement au début. Les premières semaines. Mais le temps à fait son œuvre. L’odeur a peu à peu fané. Ou s’est incrusté en moi. »
Le reste de ce court roman est à l’avenant. Sec et puissant. Obsédant. Telles ces pages sur le premier véritable amour d’Erwan. Ou ce qu’il prend pour de l’amour mais qui n’en sera pas vraiment. Les pages défilent et la vie d’ Erwan devient familière, sa douleur est la notre.
Avec ce roman du monde ouvrier, roman des non dits et des souffrances refoulées, Timothée Demeillers après Prague, faubourgs est, s’affirme comme un très grand romancier.