[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#354e63″]Q[/mks_dropcap]uand j’ai appris que Discolexique nous proposait un partenariat pour la tournée d‘Emily Jane White et House Of Wolves, le seul nom que j’ai retenu, c’était celui de la chanteuse.
J’avais été subjugué par la chanson Wake dans l’album Blood/Lines, et par l’album They Moved In Shadow All Together dont Beachboy vous parlait ici.
Ce partenariat était l’occasion de rencontrer l’artiste, et je n’allais pas la rater. Évidemment, la malédiction des relations d’Addict-Culture avec House Of Wolves, entamée le 11 février de cette même année (cf le live report de Jism ici), ne devait pas se démentir. Prendre un abonnement culturel dans un théâtre de banlieue, c’est s’engager parfois avec presque une année d’avance à assister en famille à des spectacles qui se déplacent spécialement pour vous dans les méandres de la banlieue parisienne. Ainsi était-il écrit depuis belle lurette que je ne pourrais pas participer à la communion que nous promettait le duo.
En effet, sur la base du split EP qu’ont réalisé les artistes, cette tournée nous propose un concert en trois parties, chacun interprétant séparément des chansons de son répertoire pour finir par se réunir et interpréter des morceaux en duo.
Ne pas voir le concert ne devait pas empêcher la rencontre. Rendez-vous fut donc pris ce samedi 17 mars 2018 dans l’après-midi, à FGO-Barbara, où devait se dérouler le concert commun des deux artistes le soir-même. À l’avant-veille du printemps, le climat ne devait pas me ménager, et je dus donc braver la neige et le vent glacial que l’anticyclone scandinave nous avait réservé ce jour-là.
Arrivé à bon port, accueilli chaleureusement par l’équipe de la salle, je découvre un compagnon d’infortune habillé d’un long manteau noir et d’une chapka légèrement glacée transportant son étui à guitare. Malédiction. Rey Villalobos est là, mais pas Emily Jane White. Et, ne connaissant rien de l’œuvre du Monsieur, je n’avais absolument pas prévu de lui poser mes questions passionnées et forcément passionnantes. Pourtant, ayant pu jeter une oreille sur le fameux EP, je me devais de le féliciter pour sa très belle reprise du Keeley de la dame, tout en m’excusant de ne pas avoir prévu de le rencontrer.
Malgré la grossièreté de ma démarche, l’homme ne se départ pas de son large sourire avenant et chaleureux, ajoutant, quand je lui affirme que je ne m’attendais pas à une pareille voix lorsque j’avais vu sa tête en photo, que « cette voix ne va avec rien ».
Je lui propose donc un entretien croisé après celui d’Emily Jane White, improvisation, quand tu nous tiens. Ce qu’il accepte gentiment.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#354e63″]L[/mks_dropcap]’arrivée de la chanteuse ne se fit pas (trop) attendre. Joie des retrouvailles des deux chanteurs, qui ne s’étaient pas encore vus avant de débuter la tournée. Le moment de l’interview arrive. Convivialité. À mes questions sans doute mille fois posées, maladroitement, les réponses fusent, naturellement.
Je cherche à savoir si chaque album est une réaction au précédent, à mieux connaître le mode d’écriture d’un album à l’autre. La chanteuse évoque une évolution organique, une démarche qui ne change pas. Être connectée au moment, au temps qu’elle vit et à ce qu’elle ressent. Le sentiment d’être vivante sur cette planète. Si certaines chansons évoquent des situations personnelles, la plupart traitent de ce qui arrive actuellement, du climat politique, sans pour autant le faire frontalement. La poésie prend le pas sur le réalisme. Elle ne conçoit néanmoins pas d’album-concept.
La démarche d’Emily Jane White consiste à se dépasser. Ainsi, pour le dernier album, des études de musique classique lui ont permis d’explorer sa voix et de donner à cet album a un son plus large. Stravinsky, Bartok, Beethoven, Bach, John Carpenter ou Brian Eno sont les noms qu’elle évoque lorsqu’on lui demande la musique qu’elle écoute actuellement. L’usage de sons électroniques pour ses propres morceaux ne sont néanmoins pas à l’ordre du jour, nécessitant l’assistance de spécialistes si elle souhaitait créer des rythmiques par ce biais.
Emily Jane annonce par ailleurs être en cours d’écriture de l’album à venir. L’enregistrement n’est pas encore réalisé, la sortie est prévue pour la fin 2018, début 2019.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#354e63″]L[/mks_dropcap]e temps est venu ensuite de demander à Rey Villalobos de nous rejoindre. Entretien plus détendu, le chanteur faisant preuve d’un humour imparable.
Ainsi, à la question de la rencontre, le chanteur nous explique avoir répondu à une petite annonce de la chanteuse, qui cherchait un partenaire de jogging. Emily Jane lui emboîte alors le pas en expliquant qu’ils vivent à des centaines de kilomètres l’un de l’autre, mais qu’ils avaient vraiment besoin d’un partenaire pour courir… Ils se donc connectés via Skype pour s’entraîner ensemble. Rires partagés.
La réalité est moins loufoque, le chanteur découvrant le morceau Keeley, qu’il reprend donc dans le split EP, lors d’une interview pour une radio toulousaine. Il l’ajoute donc à une playlist demandée par un blog allemand qu’elle commente. Et c’est le début de leur conversation. Puis elle l’invite à jouer à l’un de ses concerts.
Du côté de la chanteuse, c’est via une playlist de Talitres qu’elle découvre et apprécie House of Wolves. La découverte d’une appréciation musicale mutuelle a donc marqué le début de leur collaboration.
La complicité entre ces deux personnages est palpable. Racines californiennes ou signes zodiacaux seraient des pistes à explorer pour expliquer cette relation. C’est néanmoins par le mode de vie commun qu’ils l’expliquent. Qui peut mieux comprendre quelqu’un qui parcourt le monde de tournée en tournée qu’une autre personne qui enchaine les tournées ? Écrire, enregistrer des albums, avoir un mode de vie similaire, traiter des mêmes problématiques au quotidien permet de se consulter et de partager ses expériences.
Quant au EP et à la tournée qui l’accompagne, la spontanéité est bien le maître-mot du projet, Emily Jane White nous confiant « C’était super de faire quelque chose d’unique et de nouveau, et de ne faire que trois chansons pour la sortie d’un enregistrement (…) et pouvoir enchaîner derrière sur une tournée ». Techniquement, pour des questions de logistique, l’enregistrement d’un duo n’a pas été possible.
Si une sortie en vinyle n’a pas pu être réalisée à temps, elle pourrait être envisagée pour plus tard. Les deux chanteurs évoquant même avec une certaine délectation l’idée de ne sortir un disque uniquement en vinyle, pas de CD, pas de digital.
Au final, voilà deux artistes dont les œuvres sont empreintes de délicatesse, de gravité et de profondeur, mais qui s’avèrent être des personnes chaleureuses et accueillantes. La tournée qu’ils vont partager promet des instants de grâce pour le public, et des moments de plaisir partagé dans la bonne humeur pour les artistes et leur entourage. Nous leur souhaitons bonne route !
Merci beaucoup pour ce bel article ! Je m’apprête à découvrir EJW et House of Wolves sur scène ce soir à Rennes, je n’en suis que plus impatiente encore, d’autant que ce concert aura lieu dans une ancienne église. Cela promet de beaux instants de grâce, en effet !