[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]I[/mks_dropcap]l n’aura échappé à personne qu’en France, en 2017, des élections vont avoir lieu. Vous voulez avoir une idée de ce qui va arriver, de ce qui peut arriver ? Lisez donc En pays conquis de Thomas Bronnec.
Bien sûr l’auteur se défend en disant qu’il s’agit d’une fiction.
Le lecteur, lui, ne peut s’empêcher d’associer les personnages à des figures bien connues de la vie politique française.
D’où part Bronnec pour son récit ? Des législatives qui ne confirment pas les résultats de l’élection présidentielle. Une cohabitation est alors inévitable. Un président à gauche. Un premier ministre femme à droite et surtout obligée de faire avec des ministres d’extrême droite. Un banquier nommé à Bercy, un conseiller du premier ministre, très influent au niveau des idées mais plutôt limite quand il s’agit de l’argent récolté pendant la campagne et enfin une fonctionnaire de Bercy bien décidée à ne pas laisser les politiques ruiner la France.
C’est drôle parfois, féroce toujours. Les rapports entre les gens, les non dits, les petites phrases, les compromissions, les ambitions, les renoncements et l’idée de toujours, toujours avoir un coup d’avance pour faire tomber son adversaire (les réflexions du président, qui semble jouer aux échecs, avec ses proches sont assez savoureuses) et surtout tout oser.
Et puis, il y a de l’intime dans En pays conquis. Bronnec choisit avec soin ses personnages, les dessine et nous en livre quelques drames, quelques fêlures, les rendant ainsi humains malgré leur envie démesurée d’arriver ou de rester au pouvoir.
Ce sont pour moi les meilleurs moment de ce roman. Les surprises y sont nombreuses. Tel grand homme semble finalement si fragile. On accède à une partie de sa psychologie, de son histoire intime, personnelle. Je pense à une scène en particulier, formidable de tension et de surprise.
Thomas Bronnec, déjà auteur des Initiés, dont En pays conquis est plus ou moins une suite, mais qui peut se lire indépendamment, est journaliste et on sent qu’il maîtrise parfaitement les jeux de pouvoir.
C’est jouissif de voir ces hommes et ces femmes se déchirer. C’est aussi terrifiant car cela pose question sur la réalité.
Bronnec nous ballade sur une petite semaine. Celle de la constitution du nouveau gouvernement, de comment le président arrive à garder pour lui certains domaines, de comment la ministre se débat pour imposer ses idées. Et puis l’Europe en toile de fois. Y rester, la quitter ? Tout jouer sur un coup de dé ? Faire comme les anglais et demander l’avis au peuple à travers un référendum ?
Voilà tout le sel de ce roman très ancré dans la réalité française.
En pays conquis de Thomas Bronnec, éditions Gallimard, Série Noire, janvier 2017