[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]F[/mks_dropcap]ilm indépendant et second métrage de John Carpenter, Assault on Precinct 13 n’obtiendra qu’un succès mitigé à sa sortie américaine en 1976. Grand adorateur des westerns classiques de Ford et Hawks, le réalisateur de Dark Star espérait produire une œuvre issue de cette longue tradition. Faute de budget conséquent, il se contentera d’une relecture de Rio Bravo dans un cadre urbain et moderne.
Le cinéaste reprend bien les motifs inhérents au genre du western, à travers les archétypes de personnages et la structure du récit : un commissariat quasi-désaffecté, occupé par les rares policiers encore en place, est pris d’assaut par une horde de gangsters anonymes et mutiques. Un gang multi-ethnique, non-identifié, qui puise un peu dans le contexte des quartiers sud de Los Angeles mais qui s’inspire surtout de l’imaginaire barbare des Amérindiens des premiers westerns. Personnification collective d’un mal sans limites, adeptes des scarifications en tout genre et autres rituels sanglants. Des assaillants innombrables, invisibles, ingénieux, retors pour un affrontement entre deux camps à la dimension strictement manichéenne. En effet, Carpenter ne s’embarrasse pas du moindre sous-texte politique et cherche simplement à produire un divertissement efficace.
Cependant, la réalisation est aussi marquée par une tension et un suspense qui tend vers le cinéma d’horreur et fantastique, La Nuit des morts-vivants de Romero étant aussi une source d’inspiration avouée. La phase d’exposition est en soit une franche réussite. En multipliant les protagonistes, rapidement caractérisés, et en clarifiant sobrement les enjeux, le cinéaste imprime un rythme oppressant et anxiogène. Bien aidé également par le défilement de l’horloge et la partition sonore, minimaliste et lancinante, composée par Big John lui-même comme dans la plupart de ses films qui suivront.
https://www.youtube.com/watch?v=LS7k3G_6IjE
Les scènes d’action, assez modestes compte tenu des moyens disponibles, sont elles aussi teintées d’une esthétique surnaturelle, notamment lors de ces premiers échanges de tirs au silencieux et dont le trucage des impacts a un aspect presque fantomatique. Le déroulement du huis clos dans le commissariat est quant à lui relativement convenu et structuré notamment autour d’une improbable collaboration entre policier, secrétaires et prisonniers charismatiques. L’interprétation de ces rôles très schématiques fut le principal reproche, plutôt logique, de la critique à l’époque. Cet aspect marionnettiste du metteur en scène deviendra ensuite sa marque de fabrique. Si ce premier exercice de style pèche parfois et a ses défauts d’écriture, il n’en pas reste pas moins un formidable coup d’essai, confirmé 6 ans plus tard avec son chef d’œuvre atemporel : The Thing.