[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]Q[/mks_dropcap]uand on habite un pays comme la Belgique, où la météo maussade fait partie du quotidien une bonne partie de l’année, le meilleur endroit pour parler musique est encore autour de quelques bières trappistes dans un bistrot terroir.
C’est donc quelque part calés entre joueurs de cartes, chasseurs sensiblement éméchés et mémés à chien-chien que nous avons rencontré Eric Delsinne, chef de chantier du projet Eric In The Kitchen, trio dans lequel il chante, joue de la guitare et triture quelques machines en compagnie du batteur Guilhem Wetteren et du bassiste Olivier Sierogin.
Le but de cette rencontre ? L’occasion pour lui de nous présenter un projet un peu fou : la sortie de 12 EP’s en 12 mois, intitulé The Calendar Project.
Projet peu banal donc, et qui méritait bien notre attention.
Le nom du projet, Eric In The Kitchen, qu’est-ce que ça évoque ?
Cela s’est fait un peu par hasard. J’ai toujours joué dans des groupes, mais à partir de 2003-2004, j’ai commencé à jouer seul dans ma cuisine. Je n’avais pas envie de jouer sous mon nom et donc, Eric In The Kitchen s’est imposé tout naturellement. Et de plus, j’adore cuisiner. Je fais ma musique de la même façon que je cuisine, sans recettes précises. J’aime explorer. Après je suis tout à fait conscient que ça fait un peu « Where is Bryan ? , ce qui fait plutôt rire en général.
Raconte-nous un peu la genèse du groupe.
Au départ, j’enregistrais seul chez moi. D’ailleurs, pour mon premier concert qui s’est déroulé en 2010, je m’étais procuré une Loop Station. Après quelques concerts homme/machine, je me suis entouré de musiciens. Le batteur joue toujours avec moi, mais le reste du line-up a évolué. De par les disponibilités et aussi par facilité organisationnelle, nous évoluons aujourd’hui en trio en concert. Par contre, j’ai enregistré les EP’s seul. J’y joue tous les instruments excepté la batterie, qui est issue d’un logiciel. En ce qui concerne les compositions, j’en suis responsable pour une bonne partie, mais Guilhem et Olivier ont aussi apporté leur pierre à l’édifice sur quelques titres.
12 EP’s en 2017, 01 par mois, comme The Wedding Present au début des nineties. C’est un projet un peu fou et un travail considérable. Pourquoi ?
Tu n’es pas le premier qui me parle de Wedding Present. N’étant pas vraiment un fan du groupe, je n’étais pas vraiment au courant de leur démarche au départ. Le fait d’écrire un EP par mois s’est fait sur un coup de tête, au feeling. 2017 étant aussi l’année de mes 40 ans, j’ai donc écrit 40 titres.
Si je te dis Slowdive, The Cure et Girls In Hawaii, tu me réponds quoi ? Quelles sont les influences du groupe ?
Slowdive, je suis un grand fan depuis le début. The Cure, c’est vraiment le groupe qui m’a donné l’envie de faire de la musique. Quant à Girls In Hawaii, j’aime assez sans être un grand fan. On peut sans doute parler d’influences communes, à commencer par Grandaddy. Je me sens tout de même plus influencé par des groupes comme dEUS, Yo La Tengo, Pavement et le Shoegaze en général.
Revenons aux EP’s. Ils sont sortis via Bandcamp et uniquement en version numérique. Une sortie physique est-elle envisageable ?
Au départ, ils n’étaient disponibles qu’en numérique, étant donné la spontanéité du projet. Mais une version physique, en CD, existe aujourd’hui, sorti sur le label nivellois Paperheart Music. Il est vrai que le numérique permet une grande liberté, mais une maison de disques, même si dans ce cas-ci c’est plus de l’entraide qu’une véritable signature, ça reste une vitrine non négligeable. Cela dit, je n’ai pas envie de rentrer dans un circuit, faire des concours dans l’espoir d’être signé quelque part.
Quelques concerts sont prévus en Belgique, en France et en Suisse. Tu as des contacts sur place qui arrivent à vous programmer, ou c’est du DIY jusqu’au bout ?
Pour la Suisse, c’est grâce à un collectif Dourois (lieu où se déroule le célèbre festival de Dour en Belgique-NDLR) nommé XScandalous, qui a des contacts là-bas. Il s’agit d’une maison de disques et en même temps d’un disquaire basé à Genève, qui n’est ouvert que lorsqu’il y a des concerts. Pour la France et la Belgique, je démarche moi-même en général. J’ai même joué aux States. Ma femme étant américaine, j’ai écrit à gauche et à droite et je me suis aperçu que c’était assez facile de jouer là-bas. J’ai donc essayé de reproduire la même démarche pour l’Europe.
Les pochettes sont assez réussies. Qui s’est occupé des artworks ?
En majorité, les photos des pochettes sont de moi, ma femme étant responsable du reste. On a essayé autant que possible de prendre les photos lors des saisons qui illustrent les EP’s.
Comment se manifestent les retours sur ta musique en général ?
J’ai été surpris, dans le bon sens du terme, concernant le nombre d’écoutes sur mon Bandcamp. De plus, ça a été constant toute l’année. Il y avait même une certaine attente autour des EP’s à venir au fur et à mesure que les mois passaient. C’était très agréable.
Y a-t-il une certaine émulation entre les groupes de ta région ? Une scène particulière ?
Dans le collectif XScandalous, il y a certaines connexions. Après, j’essaie de m’atteler à faire des formats chansons alors que les autres groupes du collectif sont plutôt versés vers le Noise ou le Post-Rock.
L’avenir ?
J’aimerais cette fois travailler sur un projet différent, en groupe, quelque chose de moins spontané, de plus réfléchi. En 2018, nous allons surtout tourner, donc ce sera d’ici une grosse année. J’aimerais aussi que les autres musiciens s’impliquent dans le processus d’écriture et de composition.
Ci-dessous l’EP de décembre 2017 :
Eric In The Kitchen – The Calendar Project – 2017