[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]L[/mks_dropcap]e personnage outrancier sorti tout droit de l’imagination féconde de Josh Tillman est de retour avec un troisième album sous le pseudonyme de Father John Misty intitulé Pure Comedy.
Faits significatifs : les modes et le qu’en dira-t-on, il n’en a cure et il tient à nous le faire comprendre. A prendre ou à laisser.
Ami lecteur et auditeur averti, fais ton choix.
Josh Tillman n’est pas né de la dernière pluie. A bientôt 36 ans (il est né le 03 mai 1981), il a depuis longtemps compris qu’à une époque où plus personne, ou presque, ne vend de disques, le seul moyen d’exploiter ses dons de manière à pouvoir en vivre décemment est la diversification d’activités, en témoignent ses récentes collaborations avec Beyoncé, Lady Gaga ou Kid Cudi. On est bien loin du début de carrière folk minimaliste et même du coup de main derrière les fûts chez Fleet Foxes.
Avec Pure Comedy, il se démarque même des deux précédents albums qui étaient plutôt des représentations pastorales de pop joliment orchestrée façon crooner moderne, et qui touchaient du petit doigt une certaine représentation du Music-Hall. On balaie donc presque tout du revers de la main.
Fondamentalement rien n’a réellement changé dans le personnage. Une absence d’humilité dans les textes, une grossièreté dans le propos et sans doute aussi le reflet dans le miroir de quelqu’un qui admire ce qu’il fait au point de ne pas échapper au cirque du Musical Business dont il fait maintenant partie intégrante. Mais il faut bien admettre que c’est aussi ce qui fait tout son charme et son savoir-faire.
On pourrait croire que Pure Comedy est l’œuvre de quelqu’un qui pousse la chansonnette derrière une orchestration piano – voix et service minimum. Il n’en est évidemment rien. A l’instar d’un Damien Jurado qui a à ses côtés Richard Swift pour habiller ses compositions plus dépouillées, Josh Tillman peut compter sur un orfèvre de premier plan en la personne de Jonathan Wilson, producteur et arrangeur capable d’habiller les écrins des joyaux les plus beaux qui soient.
On pourrait très facilement taxer Pure Comedy de disque obsolète, lorgnant sans vergogne vers le Honky Château d’Elton John ou le Piano Man de Billy Joel, ceci pour la forme. C’est évidemment très simpliste même s’il est difficile de nier une certaine nostalgie des seventies. L’album prend des tournures contemporaines à travers les magnifiques Smoochie, Birdie ou encore Two Wildly Different Perspectives, au son et aux accords façon Radiohead et s’inspirant des silences du Talk Talk tardif.
Le Country Folk n’est pas oublié pour autant (Ballad Of The Dying Man, The Memo) tandis qu’il se la joue fripon sur Total Entertainment Forever. Il convoque même le fantôme d’Elliott Smith sur le très beau A Bigger Paper Bag et se fait doux-amer sur la très longue complainte qu’est Leaving L.A.
L’ironie cynique qui se dégage du personnage peut certes fatiguer à la longue. L’album n’est pas parfait. Des longueurs parasites et parfois trop de contemplation vers la fin du disque. Mais en vérité, un veritable tour de force mélodique. Plus que mémorisable, il suffira à Josh Tillman de franchir, encore, un palier pour que cet album puisse trouver sa place dans les grands disques du 21ième siècle.
Father John Misty, Pure Comedy, depuis le 07 avril chez Bella Union.