[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]C[/mks_dropcap]’était il y a dix ans, le multi-instrumentaliste Konstantin Gropper glissait dans sa boite à malice une relecture renversante du générationnel Born Slippy d’Underworld. L’album Rest Now, Weary Head! You Will Get Well Soon s’immisçait alors sur l’une des piles de moult succès d’estime dénichés par une presse légitimement dubitative à l’écoute d’un genre pas forcément porteur d’avenir.
Pour les besoins de la scène, le projet solo s’amplifiait de quelques compagnons de route. La pop baroque des allemands prenait gentiment son envol et Vexations concrétisait le désir d’affuter un caractère déjà bien raffiné.
Au rythme d’un disque tous les deux ans, la signature particulière de Get Well Soon s’anoblissait par davantage de relief, quitte à lâcher du lest question magnétisme. Loin de faire fonctionner la photocopieuse, le projet aux reliures symphoniques prenait une certaine allure pop sans chambouler profondément l’impression d’entrevoir un acteur principal bien assis dans un relatif confort de style.
Si en 2016, le temps était propice aux déclarations enflammées, aujourd’hui le ciel s’est brutalement assombri. L’atmosphère bien que plus épouvantée n’en est que plus sublime. C’est de cette ambivalence conceptuelle que The Horror puise sa force intérieure, de soupirs lourds de sens en harmonies divinement agencées.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]L[/mks_dropcap]e contexte historique qui rebondit par ricochets sur l’anxiogène actualité planétaire n’est pas étranger à ce glissement vers des humeurs bien plus inquiétantes. Il suffit de tendre l’oreille sur l’évocation de Future Ruins (Pt.2) pour déceler la langueur triste d’une orchestration extrêmement soignée. J’en veux pour preuve ces cuivres discrets soutenant un chant beau à pleurer (exécuté par Ghalia Benali)… Le tout sans se fourvoyer dans des hyperboles inappropriées. Ici, la texture des sons est délicatement posée sur la partition avant qu’une rythmique plus soutenue ne laisse entrer les protagonistes devant une toile de fond transposée sur des touches d’ombres hitchcockiennes.
Il y a cette étrange sensation, celle de l’auditeur convié au bal fantasmagorique des états d’âmes de Konstantin Gropper. L’élégance est redoutable lorsque ce dernier se permet de revêtir les habits de crooner larmoyant. Impossible de ne pas s’incliner face à l’impressionnante maîtrise des arrangements. Nulle rature donc, quitte parfois à pinailler sur quelques minutes trop parfaites. Il serait pourtant irrationnel de sombrer dans la médisance d’une telle critique !
https://www.youtube.com/watch?v=AxHsZ0pgTJQ
The Horror doit s’apprécier à sa juste mesure. Autant avec ses décibels étouffés qu’au bénéfice d’un vecteur de contagions finement épiques (Martyrs)… Sans oublier ce fil conducteur qui serpente le papier de vibrations emplies d’une nuée de cordes chatoyantes. Le compositeur de son timbre impliqué y exorcise ses propres cauchemars, des angoisses qui se nichent souvent au cœur de mélopées aux douceurs amères et que l’on rangera parfaitement à côté de celles écrites par de dignes contemporains tels Neil Hannon, une transfiguration pas si anodine histoire de cligner de l’œil en direction d’orfèvres pour longtemps encore en nos mémoires.
De cette musique, il en découle une dimension cinématographique des plus évidentes. Cette dernière nous permet de traverser les métaphores imaginées ici et là. À ce titre, il sera intéressant de découvrir la déclinaison en quatre épisodes de The Horror – The Series, autre preuve du brio que nous offre cette nouvelle livraison.
The Horror – Episode 1 – Martyrs from GET WELL SOON on Vimeo.
Difficile de détacher des pièces de cet ensemble dont les composantes sont si intimement imbriquées. J’oserais tout de même une entorse concernant Nightjogging au climat magnifié par une voix imprégnée de gravité outre quelques effets étranglés.
Au même titre, (Finally) A Convenient Truth est un petit bijou dont la mélodie faussement morose parvient à se transcender à la lueur d’un espoir venu recouvrir des reflets tamisés.
Une fois encore, nos tourments sont la source de motifs inspirants !