[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#1872a5″]H[/mks_dropcap]ey l’ami, tu es prêt à enfiler tes bottes, à aller chasser l’aurochs sauvage dans les grands espaces ? Tu as besoin d’une bande son pour t’accompagner ? Pas un truc de plouc hein, non plutôt un album country classe, du redneck distingué. Alors j’ai ce qu’il te faut en la personne de Gillian Welch, New Yorkaise exilée à Nashville, qui pratique depuis plus de vingt piges ce genre désuet de par chez nous.
Plus sérieusement, il y a vingt ans, en 1996 donc, sortait Revival, premier album de Gillian Welch. Réalisé sous la houlette du grand T Bone Burnett, il allait légèrement révolutionner le monde de la country en l’emmenant vers des contrées peu explorées jusque là par une femme (hormis Tarnation), notamment celles de l’alt-country voire l’indie-country, en se hissant au niveau des premiers Palace Music ou encore de celles d’un folk/bluegrass maltraité et respecté comme peu l’ont fait avant elle, révélant une sensibilité, une élégance et un tempérament peu communs. Aussi, pour fêter les vingt ans de Revival, plutôt que sortir une version mono d’origine + une version stéréo remastérisée dans les plus beaux studios de Nashville, Welch a eu l’excellente idée de faire comme Neil Young, à savoir se pencher sur tout le matériel sonore qu’elle a en stock et le faire découvrir à ses fans.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#1872a5″]P[/mks_dropcap]remier volume de ces archives : Boots N°1 : The Official Revival Bootleg (vous apprécierez le double sens ici à l’œuvre) soit un double album de 21 morceaux comprenant des démos, des inédits (8 en tout) et des versions alternatives de Revival. Soyons clairs, la révélation de ces archives ne changera rien au fait que Revival soit un album indispensable, en revanche elle permettra de l’éclairer d’une façon différente en mettant en lumière le travail de T-Bone Burnett, y apportant une certaine souplesse, plus laidback (procurez vous l’album de 1996 et écoutez les deux versions de Pass You By vous comprendrez direct ce que je veux dire), quelque chose de très félin, sensuel que les démos expurgent quelque peu. Néanmoins, l’aspect plus brut permet au contraire de mettre plus en avant encore l’excellence de ces compositions, ce respect des codes de la country et cette envie de s’en échapper via le folk, en la dénudant le plus possible, virant le superflu (pedal steel et chœurs envahissants), donnant une teinte différente à sa mélancolie, bien plus crue (Annabelle est plus poignante dans sa version démo), ou accentuant encore une certaine forme de tension (qu’on retrouve sur Tear My Stillhouse Down). Le fantôme de Townes Van Zandt plane un peu partout sur ces démos (Go On Downtown), celui de Son House sur certains blues dépouillés (I Don’t Want To Go Downtown).
Après, sur la sélection présente ici, on comprend que certains morceaux n’aient pas été retenus par Burnett et Welsh pour la finalisation de l’album, Dry Town et son approche rock 60’s sous influence Presley via les Stray Cats sous lexomil aurait fortement dépareillé, idem pour le blues un peu plan-plan de 455 Rocket. A posteriori, on peut aussi se lamenter de l’absence de certains titres mais également se réjouir que Welch ait eu la lucidité de nous les présenter dans ses archives (le superbe Go On Downtown, les bluesy Georgia Road et I Don’t Want To Go Downtown, le très enlevé Wichita).
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#1872a5″]A[/mks_dropcap]u total, la parution de Boots N°1 est une excellente initiative pour comprendre l’orientation choisie par Welsh une fois Burnett viré, comprendre que le dénuement, cette aridité musicale à l’œuvre sur Hell Among et qui trouvera son point d’orgue sur Time (The Revelator), ne venaient pas de nulle part. Elle permet aussi de prendre acte du rôle crucial du compagnon David Rawlings (qui co-écrit la plupart des morceaux présents dans ces archives) dans la maturation de sa musique ; sans lui, Van Zandt ou le Springsteen de Nebraska seraient allés faire un tour ailleurs et nous auraient privé de quelques merveilles. Toujours est-il que ces Boots N°1 en contiennent quelques unes et c’est non sans une certaine fébrilité que j’attends la parution du volume 2 (qui couvrira très certainement Hell Among …) et surtout celle du volume suivant qui s’attaquera au matériel attenant au sublime Time (The Revelator). Reste plus qu’à espérer qu’ils les sortent avant les vingt ans de Time (The Revelator), prévus en 2021 tout de même.
Sortie le 25 novembre dernier chez Acony Records et chez tous les disquaires disposant de bottes boueuses et de salles de danses country de France et d’ailleurs.
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