Loué soit Glitterhouse ou plus précisément Glitterbeat.
Sérieusement.
Non content de sortir sur leur label un des plus beaux disques de l’année en matière de Slowcore (Est-il vraiment utile de vous rappeler ce que l’on pense ici de The Weight Of Spring du Suédois de The White Birch ?) voici que le label Allemand propose ce 27 mars avec Hanoi Masters un disque d’une beauté singulière en matière de World Music.
Petit récapitulatif pour situer un peu l’histoire de cet album. Pour ce disque, War Is A Wound, Peace Is A Scar, Ian Brennan, producteur de Tinariwen, ne sachant que faire de son année 2014, s’est dit qu’il passerait bien quelques semaines à Hanoi prendre un bain de pieds de boue dans le delta du Fleuve Rouge histoire de passer le temps. Coup de bol énorme pour lui, pendant qu’il fait trempette, il tombe nez à oreille avec des musiciens, vétérans de la guerre du Vietnam. Les gars, qui se demandent ce que vient foutre ici cet indigène, prennent leurs instruments, chantent, jouent. Le Fleuve Rouge s’ouvre et ils en profitent pour le traverser, les pieds au sec, sous les yeux ébahis de Ian Brennan qui n’en demandait pas tant.
Retour au pays du producteur qui, devant ce miracle, cherche des fonds (parce que le voyage en 1ère classe c’est quand même pas donné) pour y retourner et les enregistrer. Le gars monte un projet, qu’il nomme Hidden Music, prétextant à son label qu’il cherche la véritable véracité de la musique dans une captation live en une seule prise unique avec un magnéto tout pourri pour faire encore plus authentique. Le label, harcelé et surtout lassé d’entendre ses élucubrations fantasques, lui file de quoi y retourner (avec un supplément Pavots et Psychotropes) et s’en débarrasser une bonne fois pour toutes.
Les prenant au pied de la lettre, Hanoi Masters se révélera être la première référence pour Hidden Music et l’ultime témoignage musical de Ian Brennan, perdu corps et armes au Vietnam. Fin de l’histoire.
Bon, ok, je l’avoue : c’est du grand n’importe quoi. Excepté que dans ce tissus de conneries, il y a tout de même un fond de vérité. Disons que Ian Brennan est bien parti pour Hanoi enregistrer des musiciens traditionnels, vétérans de la guerre du Vietnam. Vrai aussi que le challenge était de les capter avec des instruments quasi-oubliés, en direct, live, une seule prise et basta. Sur la poignée d’artistes présents sur le disque (cinq), certains sont des musiciens reconnus, chevronnés même, d’autres en revanche n’avaient plus chanté depuis près de 40 ans. Et c’est justement cet aspect amateur qui fait tout le sel de cet album, toute la beauté. Outre l’aspect traditionnel, War Is A Wound se veut un témoignage authentique, brut de décoffrage dans lequel on y entend les hésitations, les errements, les dérapages incontrôlés ( celui de Road To Home est superbe) des musiciens présents. Ça souffle, ça klaxonne à l’arrière plan, il y a parfois des trémolos inattendus, c’est par moment hallucinant (The Wind Blows It Away), souvent d’une grande beauté (Gratitude, Road To Home ) et même fascinant (Taking Your Spirit To The Next World).
Bien sur, le concept n’est pas neuf, il rappelle furieusement celui d’Ocora Radio-France (le pionnier en la matière), puis ceux qui ne goûtent pas ce genre de musique s’enfuiront à toutes jambes devant le résultat. Il n’empêche, pour les plus aventureux, War Is A Wound se propose en 35 mns de déplacer la pièce morne et triste dans laquelle vous écoutez votre musique en plein cœur des forêts moites et touffues d’Hanoï. Pour cela il vous suffira de chausser votre casque, fermer les yeux et vous laisser transporter. Frissons et dépaysement garantis.
Sortie le 27 mars chez toutes les agences de voyage disposant d’employés munis de cages à miel en correct état de fonctionnement ou alors chez tous les disquaires d’ici et surtout d’ailleurs.