[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#AEB6D1″]U[/mks_dropcap]n (grand) jardin. Une magnifique maison avec des tomettes rouges au sol, une grande table, et des bancs pour recevoir les invités. Ce pourrait être le Paradis. C’est en tout cas ainsi que Bernard, l’époux tendre et si bienveillant, vend l’affaire à Emilie, si amoureuse et totalement dévouée. Quitter la ville et son agitation pour un « sweet home » qui deviendrait leur nid maintenant que les enfants, devenus grands, volent de leurs propres ailes.
Il est si attentionné, ce cher homme, qu’il va jusqu’à ramener des «amies » dans cette si jolie demeure, afin que sa pauvre épouse, si seule, si fragile, si émotive, si mélancolique, ait de la compagnie. Peu à peu, insidieusement, le piège se referme. Tout doucement, le prédateur apparaît au grand jour, dans toute la splendeur de sa perversité. Oh, bien sûr, les « amies » sont drôles, belles et peu farouches. Il s’égare immanquablement dans leurs bras, mais évidemment, elle reste la seule, l’unique, l’incomparable, l’aimée.
Peu m’importait qu’elle soit là, s’il restait ici, s’il continuait à s’allonger près de moi, s’il continuait à m’embrasser dans le cou, et à m’appeler mon cœur.
Alors, elle se tait. Elle se mure dans la souffrance, elle subit, elle ravale ses larmes et sa colère. Elle lui trouve mille excuses, passe de la sidération à la rage, mais elle reste. Elle reste là. Toujours. En dépit de tout, elle attend. Elle s’enferme, parfois consciente, parfois lucide, mais toujours fidèle à ses engagements, dans cette relation-cloaque qui l’éteint un peu plus chaque jour. Jusqu’au moment où…
Avec Qui ne dit mot consent, Alma Brami signe son septième roman et dépeint remarquablement les rouages parfaitement huilés de l’emprise psychologique qu’exercent les pervers narcissiques. La plume se fait oppressante et sinueuse, le style acéré donne des sueurs froides et on ressent, en fin de lecture, comme un besoin de respirer, de se laver de cette couche de boue que Bernard dépose sur la peau et sur le cœur d’Emilie.
Le résultat est aussi brillant que glaçant, l’histoire est effroyable et il ne faut pas oublier que pour beaucoup de femmes, elle est aussi une réalité…
Qui ne dit mot consent est l’un de ces romans qui méritent qu’on en parle, pour éviter qu’il ne se noie, dans le flot de la rentrée littéraire.
Qui ne dit mot consent d’Alma Brami
paru aux éditions Mercure de France.