[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]R[/mks_dropcap]odolphe Barry est peut-être le plus américain des auteurs français.
Né à Troyes, on a pourtant l’impression, quand on lit un de ses romans, que l’auteur est un natif du continent outre-Atlantique dans lequel les intrigues se déroulent.
Nous ne sommes pas dans la parodie romanesque du style du roman américain à l’instar de Tanguy Viel avec La disparition de Jim Sullivan, tout respire l’authentique, l’atmosphère de l’Amérique, le contexte historique, les personnages, l’écriture.
Dans Honorer la fureur (clin d’œil à Faulkner sans doute), Rodolphe Barry brosse le portrait de James Agee, dans une sorte de biopic qui redonne sa part de noblesse à cet auteur peut-être méconnu ou oublié, tout en remettant notre homme dans son contexte historique.
Nous sommes dans les années 30.
James Agee au début du roman, est un jeune idéaliste, épris de littérature, de poésie, qui collabore dans le journal le plus libéral de l’époque, Fortune, qui salue la politique du New Deal alors que la moitié du pays crève littéralement la dalle.
C’est une situation quasi schizophrène : comment ne pas se compromettre intellectuellement quand on respire des convictions aux antipodes de son employeur même s’il s’agit de manger ?
Or, on lui propose de partir en reportage dans les contrées lointaines du pays, prendre le pouls des indigents même si on peine à imaginer ce qu’ils peuvent bien subir quand on vit à la ville, éloigné de tant de problématiques.
Il s’adjoint l’aide du photographe Walker Evans qui le suit dans ses pérégrinations.
Et là, c’est une révélation, les deux hommes touchent la misère de près, des fermiers endettés jusqu’au cou qui ne se dégagent à peine quelques dollars pour leur propre subsistance.
Les débuts sont difficiles, mais grâce à une profonde humanité et beaucoup d’empathie, ils parviennent à gagner la sympathie des autochtones dignes et hospitaliers.
Il en ressortira un livre qui paraîtra beaucoup plus tard dans l’indifférence mais qui fera date, Louons maintenant les grands hommes.
[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]J[/mks_dropcap]ames Agee est un personnage, exalté, passionné, passionnant, parfois en contradiction avec lui même, volage aussi, qui consommera la vie par les deux bouts, marqué par de nombreux écarts entre alcoolisme et tabac.
Son parcours est jalonné de beaucoup d’échecs, de déceptions, de projets avortés.
Mais il sera reconnu pour ses talents d’écrivain par ses pairs.
Ses chroniques de cinéma sont saluées et remarquées, elles vont lui permettre d’ouvrir des portes et des rencontres inattendues.
John Huston s’attache ses services, Charles Laughton l’embauche pour l’écriture du scénario de La Nuit du chasseur.
Il défend Charlie Chaplin en pleine accusation de son manque de patriotisme pendant la chasse aux sorcières du maccarthysme.
Tout cela, on le sait sans doute pour ceux qui connaissent la vie de James Agee. L’auteur utilise d’ailleurs le style omniscient délivrant une forme de vérité générale, comment son existence s’est déroulée de manière factuelle.
Rodolphe Barry parvient néanmoins à nous donner toute la complexité de ce personnage en conflit avec lui-même, avec ses excès.
En imaginant des dialogues avec ses proches il permet de caresser les facettes d’une personnalité ambivalente et de ce qu’aurait pu être son caractère parfois entier, obnubilé par l’écriture.
Une fois la lecture finie, on ne désire qu’une chose, nous plonger dans l’univers de cet auteur, relire son œuvre.
Honorer la fureur de Rodolphe Barry
paru aux Editions Finitude, Mars 2019
Bonjour, voici un bon article qui votre juste compréhension de ce livre, « Honorer la fureur » (finitude)
Un grand merci à vous.
rodolphe barry (l’auteur)
Bonsoir,
Je suis entrain de lire ce livre qui m’a été conseillé par mon libraire. j’en suis aux 3/4 même passé et je me demandais si il ne s’agissait pas d’une biographie jusqu’à lire votre article. Dans tous les cas je ne regrette pas le conseil de mon libraire.