Pourquoi Kaze Watanabe a-t-il décidé de disparaître ? Qu’est-ce qui a poussé ce père de famille casanier, salaryman consciencieux, à abandonner femme et domicile ? C’est ce que Isao Moutte nous raconte dans Les Évaporés.
Nuit d’avril 2012. En silence, Kaze Watanabe part pour Tokyo. Il intègre alors ceux qu’on nomme les « évaporés » : ces disparus volontaires, sans explication ne sont pas recherchés, ni par la police – ils n’ont enfreint aucune loi, ni par les familles non plus – accablées par le déshonneur.
Phénomène de masse, l' »évaporation » concerne près de 80000 personnes par an sur l’archipel. Cependant, Kaze abandonne-t-il son quotidien sans raison ? Que cherche-t-il à fuir ? Ou bien poursuit-il un objectif ?
L’auteur franco-japonais Isao Moutte publie aux éditions Sarbacane une intrigante sixième bande dessinée. Adaptée du roman éponyme de Thomas Reverdy, Les Évaporés relève autant du suspense policier que de la quête existentielle. Il montre autant les fêlures du Japon post-Fukushima que les malversations et la brutalité qui ont procédé à sa reconstruction.
Surtout, il délivre dans un album de format et de découpage franço-belge une vision qui échappe aux lieux communs et cartes postales, empruntant aux genres de l’aventure, du policier comme de l’intime. Son histoire nous dépeint par de nombreuses cases muettes les conséquences du tremblement de terre de 2011, ses victimes, qui se mêlent aux laissés-pour-compte d’une ultralibéralisme violent, auxquels s’ajoutent les disparus volontaires.
Le style, sobre et dépouillé, l’utilisation du noir et blanc et le trait hachuré expriment pudiquement failles et émotions : nul doute que Les Évaporés demeure, pour le lecteur, bien présent après sa lecture.