[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#2D7E96″]I[/mks_dropcap]l aimait la mer et l’aventure. Il avait 29 ans lorsqu’il a été tué, en avril 2009, sur son voilier, par une balle perdue de la Marine française venue lui porter secours. À lui et à quatre autres personnes, otages de pirates somaliens. Cette tragédie, c’est la toile de fond de L’homme aux bras de mer (Futuropolis), alias Mohamed, l’un des cinq hommes auteurs de l’attaque.
D’un côté, un fait-divers terrible, à plus de 600 kilomètres des côtes somaliennes. De l’autre, l’itinéraire chaotique d’un grand gamin turbulent avec, pour seul horizon, les dégâts d’un tsunami dévastateur, une pêche jamais miraculeuse et du khat à mâcher. Pour ce jeune Somalien en perdition, ce sera donc l’irréparable, puis l’arrestation et la prison, à des milliers de kilomètres de chez lui, dans la région rennaise.
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Au milieu de toute cette histoire, il y a Maryvonne, qui veut se rendre utile et donne des cours de français à Mohamed. Elle ne va pas compter son temps, découvrir les affres de l’administration, tenter de convaincre son mari Roger de faire fi de jugements hâtifs, militer au sein de la Cimade, une association qui accompagne les personnes étrangères dans la défense de leurs droits. Autre personnage central de l’histoire : la communauté d’Emmaüs, où le jeune Somalien finira par trouver sa place, avant d’être définitivement jugé et rattrapé par son passé.
Ce qui est intéressant avec cette bande-dessinée co-signée Simon Rochepeau (à l’écriture du récit) et Thomas Azuélos (pour les dessins flirtant avec l’aquarelle, et pour les couleurs, toute en nuances de noir-gris-bleu), c’est qu’il n’y pas de parti-pris, pas de jugement. Les deux auteurs nous éclairent ainsi sur des faits, mâtinés de ce qu’il faut juste de fiction, qui ne sauraient se résumer à quelques lignes trop simples dans un journal, sans pour autant faire de Mohamed le personnage sympathique qu’il ne saurait être : attachant certes, il a quand même gravement déconné et devra purger sa peine pour cela.
L’homme aux bras de mer est un ouvrage qui vaut le détour. À sa lecture, on sent que sa réalisation à dû s’appuyer sur une belle aventure humaine. On imagine en effet qu’on ne peut sortir indemne de faire témoigner, de raconter, d’illustrer et d’éditer une telle histoire. Ne serait-ce qu’un égard aux victimes du drame. Pour cela, il faut assurément faire preuve de sensibilité. Pari gagné.