Quand on parle de manga de sabreur, L’habitant de l’infini (Mugen no Jūnin) est un classique du genre. L’œuvre d’Hiroaki Samura sublime à l’encre de Chine le Japon féodal. Bienvenu au Japon de l’ère Edo, là où les samouraïs et les écoles étudiant leur art se mènent une guerre fratricide.
Publié entre 1993 et 2011 dans le Monthly Afternoon (magazine de prépublication), l’histoire de Manji se raconte en une trentaine de tomes. Casterman nous offre aujourd’hui une nouvelle édition : l’occasion de découvrir ou redécouvrir ce classique qui a inspiré les auteurs des shonens des années 2000.
Samouraï sans maître, Manji doit expier ses crimes. Abîmé par une vie de combat, son corps couvert de cicatrices, un œil balafré et de nombreuses armes à son attirail, Manji est un héros unique en son genre. Rendu immortel par de mystérieux vers, son passé criminel le poursuit à jamais dans une vie infinie. Ce parasite guérit ses nombreuses blessures, l’empêchant de tomber au combat : rongé par ses fautes, Manji doit se racheter pour lever la malédiction.
Son chemin va croiser celui de Rin, fille d’un maître à la tête d’un dojo et école du sabre. Ayant assisté au meurtre de sa famille, elle souhaite se venger de l’ittoryu : école rivale dont la renommée se fait dans le sang et la violence. Un destin lié se dessine entre Rin et Manji. La vengeance de Rin, jeune et faible, et Manji, cherchant son salut, se fera avec la chute de l’ittoryu.
A travers le périple désespéré de Rin et Manji, on découvre une œuvre marquée par des scènes brutales et sanglantes, qui laisse place à une fascination dérangeante, sublimée par le dessin de l’auteur. Loin de se résumer à une œuvre gratuitement violente, c’est grâce aux relations et aux ambitions des personnages que l’on s’attache au récit. Le passé douloureux de nos deux héros les poussent à se soutenir, et à évoluer ensemble, malgré les épreuves incarnées par des antagonistes au chara-design mémorable.
La richesse des antagonistes est la grande force de ce manga : loin de représenter simplement le mal, ils poussent les héros dans des dilemmes terrifiants et affrontements remarquables. Chacun possède son identité : parfois détestés, parfois attachants, ils ne laissent pas indifférents.
C’est donc une épopée remplie de désespoir que l’on suit au fil des pages, à la beauté glaçante. Des personnages torturés (dans tous les sens du terme) mais magnifiés par un auteur au dessin subtil et précis, l’habitant de l’infini est une œuvre discrète à découvrir absolument.
Ce monument du manga de sabreur est publié aux éditions Casterman. Les 6 premiers ouvrages sont désormais disponibles, regroupant les tomes 1 à 12 d’origine.
L’Habitant de l’infini – Tome 6 – de Hiroaki Samura
Traduit par Yohan Leclerc
Casterman, Octobre 2024 pour cette nouvelle édition
Pour aller plus loin :
Podcast : [La 5e de couv’ – Nos 10 samouraïs préférés dans les mangas du moment]
Adaptation animée : [Amazon Prime – L’habitant de l’infini]