[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#8c94ff »]M[/mks_dropcap]arion Montaigne illustre et raconte une incroyable expérience : celle de Thomas Pesquet, qui a passé 196 jours à 400 km au-dessus de nos têtes, dans la Station Spatiale Internationale. Cela valait bien un docu-fiction en forme de BD. Et en plus, c’est drôle !
Illustratrice pour la jeunesse, auteure de bandes-dessinées (La Vie des Très Bêtes chez Bayard, Riche, Pourquoi Pas Toi, chez Dargaud), Marion Montaigne n’a pas son pareil pour traiter de sujets scientifiques, tout cela dans une bonne humeur communicative. Dans la Combi de Thomas Pesquet (Dargaud) ne fait pas exception. Certaines cases de la BD sont si richement documentées qu’on en reste baba. Un tel boulot lui aura quand même pris deux ans.
D’abord parce que, lancée sur les traces de l’astronaute, de Cologne à Moscou, puis de Houston à Baïkonour, il lui aura fallu appréhender tous les tenants et aboutissants d’une aventure hors-norme : la sélection du Français (sur 8413 candidatures), sa formation, la vie dans la station, le retour sur Terre…
Ensuite, parce que toutes les étapes vécues par Thomas Pesquet se sont lentement, très lentement égrenées. Les exercices refaits à foison, les mises en quarantaine en veux-tu en voilà, les petits manuels techniques par dizaine et les photos dédicacées par centaine… Tout cela a pris 7 ans de la vie du Français. Beaucoup de temps donc, de patience, d’entraînements, d’abnégation, de renoncements, avant le grand saut final. C’est que Rome ne s’est pas faite en un jour !
Mais au bout du bout, le bonheur et l’adrénaline étaient bien là. Quitte à faire des envieux. D’aucuns seraient même capables de vendre leur mère pour ça (ainsi que le suggère l’astronaute Buzz Aldrin, que Marion Montaigne se plaît à faire parler dans la BD).
L’auteure ne fait pas que suivre les pas de Pesquet. Elle contextualise aussi le propos, en distillant des anecdotes et autres petits bonus historiques qui en disent long sur le financement des expéditions, la vénération des Russes pour Gagarine, etc.
En dépit des drames et des difficultés rencontrées – de l’explosion de la navette Challenger à la désintégration de Columbia, en passant par le problème d’une simple petite vis bloquée – Marion Montaigne témoigne aussi de la capacité des grandes puissances à savoir s’unir pour construire un objet flottant dans l’espace, grand comme un terrain de football américain et… habitable. Rien que ça !
Comme ce grand livre ouvert sur l’infini ne saurait nous prendre la tête, la BD se révèle souvent amusante. Exemple avec ces visages grimaçants lors d’une accélération 4G ou ces têtes d’ahuris des astronautes devant le passage d’un supposé excrément en impesanteur ! L’utilisation ponctuelle de la bichromie, associée à un procédé narratif qui nous interpelle directement (Là, vous vous dites, mais pourquoi diable les Russes vont au fin fond du Kazakhstan pour décoller), permet de nous projeter dans l’Histoire ou dans un imaginaire bien pratique pour faire de la pédagogie rigolote. Et puis hop, la page d’après, nous voilà revenus dans le récit. C’est malin et, encore une fois, les situations dessinées sont marrantes.
Alors, si vous avez envie de sortir du bureau et de sauter, le temps d’une drôle de BD, lisez l’ouvrage de Marion Montaigne : la couverture cartonnée vous fera de l’effet, les 208 pages à suivre vous feront décoller.