Qu’il est bon parfois de s’adonner à la légèreté. Des monstres, des hommes et sans doute des croisements sympathiques venus de l’île des légendes pour nous bercer dans cet onirisme ludique. De la musique islandaise on connait les antiques sagas mais surtout l’œuvre de la fille de Gudmun, ambassadrice épatante qui dans son sillage permit à une litanie d’enchanteurs de la suivre à la conquête du monde (de Mum à Sigur Ros en passant par Soley ou Gus Gus pour n’évoquer que la partie visible de l’iceberg)
Of Monsters And Men fait partie intégrante de cette génération de musiciens sans complexe dont la fraîcheur d’esprit est un véritable bain de jouvence. Pour ceux qui ont eu la chance comme moi de plonger dans les eaux du Blue Lagoon la métaphore n’est ici point usurpée.
Classé dans la catégorie d’indie folk, le combo peut faire penser à des cousins pas si éloignés de nos amis canadiens d’Arcade Fire lorsque ceux-ci s’essayaient alors à des salves aussi percutantes que sémillantes.
Révélation en 2010 de l’Airwaves Festival, les islandais s’envolent vers nos contrées avec un premier album hybride intitulé My Head Is An Animal. Le groupe qui tient son nom d’une allusion au célèbre roman de Steinbeck y dévoile tout un univers où les chœurs à l’unisson répondent aux harmonies et rythmiques les plus vivifiantes. Les accents nordiques du duo vocal – Nanna et Raggi – s’entrechoquent dans une douceur qui petit à petit prend une ampleur bucolique. L’humilité transpire de cette superbe alchimie. Une candeur touchante loin du snobisme qui gouverne les productions plus proches de nos rives. Les mélodies entrainantes réchauffent les cœurs. On se surprend sans honte à sourire devant tant d’authenticité. On pense aux troubadours facétieux de I’m From Barcelona. Un entrain qui contamine les zygomatiques et gambettes. C’est accrocheur et on ne demande qu’à se délecter d’une suite aussi relevée.
Exercice souvent casse gueule que l’élaboration d’une seconde œuvre, surtout quand la première a suscité un vif intérêt. Le risque alors de tomber soit dans la redite barbante soit dans la dangerosité d’un virage à 180°.
Beneath The Skin s’avère être un compromis habile, une transition hypothéquée vers des évolutions plus matures.
C’est la cavalcade qui nous entraîne sur Crystals et son ouverture aux empreintes indélébiles. La réflexion alors qu’est la mienne d’imaginer un mode de substitution aux sempiternels gavages de la bande FM.
Avec Human, je suis bien les pieds sur Terre mais ma tête est dans les étoiles. Un périple statique où le paysage défile sous mes yeux pour une chasse aux images teintées de quelques audaces frénétiques.
Hunger sera la construction la plus redoutable de l’œuvre. Une introduction calme qui tranche avec une montée d’adrénaline magnifiée par strates successives. De cette pop enflammée qui ravive les territoires les plus frileux, la pièce maitresse de l’opus exalte l’écoute dans un tumulte qui allie force et émotion. Un final épique qui donne la chair de poule malgré la chaleur nouvelle qui incendie les enceintes.
De manière irréfutable, le sextette a su préserver la fraicheur de ses jeunes origines. Toutefois, il saupoudre délicatement plus de soins dans une orchestration devenue (et c’est tant mieux) acérée.
Avec Empire c’est l’évidence d’un refrain que l’on fredonne d’un phrasé aussi efficace qu’un brumisateur géant.
L’épicentre de l’album est moins magnétique. Sans parler de remplissage, passé les cinq premiers titres, l’artillerie s’essouffle et frise la rengaine éculée. Les choses y sont décortiquées en mode moderato sans pour autant trouver une résonance marquante dans mon esprit.
En fait, les petits malins nous avaient mis en zone d’attente. Objectif de nous chavirer avec une fin d’opus aux remontées ardentes :
Thousand Eyes comme une éruption immense … La tension est magique !
Enchainement alors sur I Of The Storm, morceau angélique d’une délicatesse souple qui vient se nicher derrière des roulements finement aiguisés.
On peut alors se noyer dans We Sink et prolonger le voyage avec les quatre bonus qu’offre l’édition deluxe.
Album coproduit par Rich Costey déjà en vente depuis le 9 juin dans les bons kiosques à musique et en écoute intégrale ICI